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L’année 1875 donna donc un excédent des recettes sur les dépenses de 13,870,406 francs, et, depuis lors, aucun budget ne s’est soldé en déficit, bien que l’année 1878 ait eu à supporter une crise commerciale et que la récolte de 1879 ait été insuffisante.

Cette même année 1875, — et c’est là le progrès le plus notable qu’il y ait lieu de constater, — ne vit pas seulement un excédent de recettes succéder au déficit du budget, elle vit aussi cesser les créations de papier-monnaie par lesquelles le gouvernement italien subvenait à ses besoins de trésorerie. De 450 millions en 1870, la circulation du papier-monnaie arriva en 1875 à 940 millions, chiffre le plus haut qu’elle ait atteint, mais auquel il n’a été rien ajouté. Les hommes d’état italiens ne se dissimulaient pas qu’il faudrait quelque jour retirer de la circulation ce papier-monnaie et que chaque émission était un emprunt déguisé, contracté sous la garantie de l’honneur national ; ils ne se faisaient point illusion sur l’apparente gratuité de ces sortes d’emprunts. Indépendamment du crédit qu’ils étaient contraints d’inscrire au budget de chaque année pour la dépense d’agio qu’entraînaient les paiemens du trésor à l’extérieur, le pays payait à un taux usuraire les intérêts de ce milliard en papier par la perte que la disparition des métaux précieux l’obligeait à subir dans ses transactions avec l’étranger. Il faut donc louer les hommes d’état italiens de s’être rendu compte des dangers que la multiplication du papier-monnaie faisait courir à la fortune de leur pays et de ne s’être pas laissé séduire par ce moyen facile de faire face à leurs embarras financiers. Ils se préoccupèrent de bonne heure de prévenir la dépréciation du papier-monnaie en entourant de garanties sa fabrication et sa mise en circulation, et ils essayèrent de suppléer par des expédiens ingénieux à la convertibilité qui pouvait seule le ramener et le maintenir au pair. Tel fut l’objet de la loi du 30 avril 1874, dite loi du consorzio, qui constitua en syndicat les six banques déjà investies du droit d’émission, la Banque nationale, les Banques de Rome, de Naples, de Sicile, de Toscane et la Banque toscane de crédit, et remit à ce syndicat, moyennant un abonnement, la tâche d’émettre et de renouveler les billets de toute coupure, depuis 50 centimes jusqu’à 1,000 francs, qui devaient être reçus comme espèces par toutes les caisses publiques et privées. Un article de cette loi, introduit par la chambre avec l’assentiment du ministre des finances, M. Minghetti, prescrivait au gouvernement de présenter au parlement, dans le délai de six mois, un rapport sur l’étendue de la circulation fiduciaire et sur les mesures propres à amener la cessation du cours forcé. Ce vote trahissait des espérances dont la réalisation ne pouvait être prochaine, mais il avait le mérite d’indiquer très clairement au gouvernement la voie dans