Page:Revue des Deux Mondes - 1881 - tome 48.djvu/928

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

navigation, la vallée où elle se déploie offre du moins des avantages ; elle est utile aux voitures, aux transports par terre toujours difficiles dans un pays montagneux ; aile sera bientôt d’un grand secoure pour l’ouverture prochaine d’un chemin de fer central. Depuis le débouché du fleuve dans le Danube jusqu’à son entrée dans le grand défilé de Kolatch, une voie ferrée ne trouvera aucun obstacle, en supposant toutefois que le défilé, d’une longueur de trois lieues, ne puisse être tourné. Kolatch se trouve placé à 8 kilomètres de Leskowatz. Avant et après cet obstacle, ce ne sont que plaines et vallées.

La colline haute de 500 pieds, qui forme le défilé de Kolatch et au pied de laquelle coule la Morava, descend au sud dans la plaine de Nisch et la domine presque entièrement. La ville de Nisch, qui n’est qu’à 8 kilomètres de cette hauteur, est cachée par une autre colline, mais on peut de là suivre très loin, dans la direction du nord-est, le cours de la Morava, et, à l’est et au nord, reposer sa vue sur le plateau élevé de l’ancienne Dordonie.

On suppose bien que la vallée de la Morava était autrefois comme aujourd’hui le passage le plus facile et le plus fréquenté. Les routes actuelles sont de construction relativement récente, puisqu’elles sont dues à Milosch, le premier prince de Serbie ; elles datent seulement du commencement de ce siècle. Du reste, leur nombre est restreint, puisque nous n’en connaissons que six. La plupart sont macadamisées et ont une largeur de 7m,50. Les Serbes, sans cesse en butte aux invasions des janissaires, n’avaient aucun intérêt à rendre facile l’accès de leur territoire. Ils vivaient en pasteurs au fond des forêts, y élevant d’innombrables troupeaux, leur plus grande richesse. Si, à la voix de chefs patriotes, ils en sortaient pour la défense du pays, on ne les voyait revenir dans leurs vertes solitudes qu’après avoir refoulé l’oppresseur.


IV

Les descendans de ces Serbes pasteurs, qui savaient si bien, lorsque le patriotisme l’exigeait, se transformer en soldats, ont gardé les mœurs pures de leurs ancêtres. Aujourd’hui encore, beaucoup de familles serbes, grâce à leur habitude de vivre loin des grandes villes et comme cachées dans l’ombre de l’un de ces monastères qu’éleva dans les forêts le grand empereur Douschan[1], sont restées des modèles de simplicité, de vertus domestiques et

  1. De 1336 à 1356.