Page:Revue des Deux Mondes - 1881 - tome 48.djvu/481

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

combinaisons parlementaires, s’éloigne des libéraux et se rapproche des conservateurs » des catholiques du centre, il ne fait qu’obéir à la logique de la situation qu’il a prise ; il suit pour ainsi dire le courant de ses préoccupations. Il ne s’enchaîne sûrement pas à un système ? il prétend s’en servir pour en tirer tout le parti possible dans l’intérêt de ses projets, en se réservant la faculté de toutes les évolutions utiles. Ce qui est certain, c’est qu’après avoir engagé toute sa politique dans un sens, comme il l’a fait, il ne pourrait plus facilement peut-être modifier d’un jour à l’autre sa stratégie, et les prochains débats du Reichstag, du parlement prussien, qui suivra de près, vont avoir cela de curieux qu’ils laisseront sans doute entrevoir avec plus de précision les idées de M. de Bismarck ; ils permettront de mieux distinguer comment le chancelier entend se tirer de cette crise du moment, quelle direction il se propose de donner aux affaires intérieures et extérieures de l’Allemagne.

Qu’en est-il, d’un autre côté, cependant, de ce voyage que le roi Humbert vient de faire à Vienne et qu’il n’a pas poussé jusqu’à Berlin, sous prétexte que ce serait inutile ou qu’une telle démarche pourrait être mal interprétée ? Sans nul doute le roi Humbert, avant de partir pour Vienne, était bien assuré d’être reçu avec une parfaite courtoisie à la cour de l’empereur François-Joseph ; il a trouvé de plus, à ce qu’il paraît, l’accueil le plus gracieux dans la population viennoise. La ville et la cour ont été d’accord pour fêter sa présence, pour lui rendre agréable son passage dans la capitale autrichienne. L’entrevue des souverains a même offert cette particularité que, pour la première fois, le roi et la reine d’Italie se sont rencontrés avec l’impératrice d’Autriche, qui est une sœur de l’ancienne reine de Naples, et qui s’était dérobée à l’éclat des visites échangées il y a quelques années entre l’empereur et le roi Victor-Emmanuel. Cette fois, tout s’est passé pour le mieux. Le roi Humbert n’a pu donc être que satisfait ; ses ministres, M. Depretis et M. Mancini, ont été aussi satisfaits que lui, et le ministre des affaires étrangères, M. Mancini, a même trouvé l’occasion d’épancher son contentement dans une conversation avec un journaliste de Vienne en déclarant que tous les partis en Italie, sauf une fraction minime, approuvent une politique de complet accord avec l’Autriche et l’Allemagne pour « assurer la paix universelle. » Les Italiens, à leur tour, se sont réjouis de l’accueil fait à leur roi et ils se sont hâtés de célébrer un événement auquel leur imagination attribuait déjà peut-être une importance et des conséquences un peu démesurées ; mais au moment où les Italiens s’applaudissaient du voyage royal à Vienne comme d’un coup de maître de leur diplomatie, voici un incident malencontreux qui a failli tout gâter, un incident où le télégraphe, qui n’en fait jamais d’autres, a eu son rôle. Le chef de section aux affaires étrangères de Vienne, M. de Kallay, qui dirige la diplomatie