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violences ; si des droits sacrés sont violés par ceux mêmes qui en d’autres temps les avaient réclamés avec le plus de véhémence ; enfin, sous le rapport de la liberté vraie et du respect de la conscience individuelle, si nous sommes en voie de reculer en-deçà de ce que le régime de 1830 nous avait réellement donné, on ne saurait rien reprocher au temps actuel en ce qui concerne l’essor de l’activité humaine dans la sphère du travail et de l’industrie. Là, au contraire, tout est motif à louange et à satisfaction sérieuse. Oui, au point de vue politique, les diverses classes de la société obéissent plus à des prétentions individuelles qu’à des opinions ; dans l’ardeur des polémiques, dans les luttes électorales, on découvre surtout la recherche de la clientèle et du gain. Mais sur le terrain propre des affaires, on ne rencontre pas les mêmes contradictions et l’on n’y redoute aucune hypocrisie ; chacun sait et dit ce qu’il veut, et nul ne se pare de fausses vertus. Ce n’est pas assurément par une philanthropie plus ou moins sincère qu’on se livre à un travail incessant ; mais aussi ce n’est pas en excitant des passions mauvaises et en présentant d’audacieux mensonges comme les vérités de l’avenir qu’on obtient le succès : le seul moyen au contraire de l’assurer est de ne pratiquer que le vrai et de ne produire que le bon, — bon et vrai dans des sphères secondaires, dira-t-on, mais qui cependant, en satisfaisant aux besoins matériels de l’homme, développent aussi son intelligence et concourent largement aux progrès de la civilisation. Tous ceux donc qui, sur le terrain des affaires proprement dites, poursuivent leur propre fortune, peuvent l’avouer sans remords, puisqu’ils ne la devront qu’à leur honnêteté et à leur aptitude, et qu’ils modifieront à l’avantage du public le précepte morose donné par le fabuliste, en recherchant

Leur bien premièrement et puis le bien d’autrui.


Nous avons à plusieurs reprises fait ressortir les heureux résultats des opérations financières et industrielles et, par conséquent, les mérites de leurs auteurs ; nous avons dû même, jusque sur le terrain de la spéculation proprement dite, et dans les transactions de la Bourse et du marché libre, reconnaître que la délicatesse la plus scrupuleuse présidait au règlement des affaires, puisqu’elles se traitent le plus souvent sur simple parole donnée ; nous ne saurions donc nous empêcher, en constatant à nouveau les progrès du travail matériel, de payer un juste tribut d’éloges aux hommes qui, en France, y consacrent leurs soins et leurs lumières, et nous croyons pouvoir appeler la sympathie publique sur leurs noms.


BAILLEUX DE MARISY.