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Jean-Baptiste : ces deux pièces encadraient un spectacle plus profane, ayant pour sujet les Notées de Pirithoüs. Au premier acte, on vit paraître huit héros et autant d’héroïnes : Hercule et Déjanire, Jason et Médée, Thésée et Phèdre, etc., qui charmèrent les spectateurs par leurs chants et leurs danses. Surviennent les Lapithes, qui cherchent à enlever les danseuses. Une lutte s’engage : Hercule et ses amis font des prodiges de valeur et finissent par mettre en fuite les agresseurs. À ce spectacle succédèrent l’Histoire de Bacchus et d’Ariane et celle de ce Juif qui brûla le corps du Christ. Ne nous étonnons pas de ce mélange d’élémens sacrés et profanes. N’était-ce pas le temps où Laurent le Magnifique composait à la fois, avec un incontestable talent, son Triomphe de Bacchus et d’Ariane et son Mystère de saint Jean et de saint Paul ? Dans ce dernier, le poète florentin n’hésitait pas à mettre en scène les personnages les plus divers : un ange, sainte Agnès et ses parens, Constantin et sainte Constance, Gallicanus, saint Basile, des astrologues, la vierge Marie ordonnant au martyr saint Mercurius de tuer Julien l’Apostat, qui expirait en poussant le cri : « O Galiléen, tu l’emportes ! »

Les mystères restèrent d’ailleurs longtemps encore en possession de la faveur publique. A Rome, chaque année, le vendredi saint, la confrérie du Gonfalone, dont, faisaient partie des artistes distingués, entre autres le peintre Antonazzo, représentait au Colisée, rendu pour un instant à sa destination primitive, les différens épisodes de la Passion.

Le palais pontifical lui-même finit par servir d’asile à des représentations. En 1484, lors du carnaval, on y joua, sous les yeux de Sixte, qui jugea toutefois prudent de ne pas prendre place au milieu des spectateurs, l’Histoire de Constantin le Grand. Un familier du pape, né et élevé à Constantinople, mais d’origine génoise, s’acquitta avec tant de succès du rôle principal qu’il reçut le surnom de Constantin et s’honora de le porter sa vie durant. (Un exploit de même nature valut plus tard au bibliothécaire de Jules II et de Léon X, à Thomas Inghirami, le surnom de Phèdre.) Dans la suite, un des neveux du pape, le cardinal Raphaël Riario, prit sous sa protection particulière ces essais auxquels le théâtre italien a dû sa renaissance. Vers la même époque, le clergé florentin s’engagea dans une voie parallèle. En 1476, les clercs de Santa Maria del Fiore représentèrent, sous la direction de leur maître, ser Piero Domizlo, des comédies latines. Laurent le Magnifique honora de sa présence la représentation qui eut lieu dans l’église de Tous-les-Saints (Ognissanti).

Sixte et les siens ne triomphèrent pas cependant de toutes les objections, de toutes les résistances. Il y eut des réfractaires jusque