18 mars, on avait demandé au gouvernement si le Limbourg et le Luxembourg resteraient attachés à l’Allemagne, et M. de Bismarck avait déclaré qu’il n’entendait pas faire violence aux souverains qui n’avaient pas accédé à la Confédération du Nord. « Il ne voulait pas, disait-il, par une pression inconsidérée, ajouter aux matières inflammables qui menaçaient de mettre le feu à l’Europe. » Mais il était évident que les interpellations se reproduiraient violentes et passionnées le jour où l’on apprendrait que le Luxembourg, au lieu de rester à l’Allemagne, était cédé à la France, a Toute la presse prussienne, écrivait M. Benedetti à la date du 26 mars, s’occupe de l’affaire du Luxembourg dans un sens regrettable. M. de Bismarck pourrait de nouveau être interpellé, et il lui serait difficile d’être aussi évasif que la première fois. Il est urgent qu’on prenne un parti à La Haye. »
Mais déjà le roi des Pays-Bas avait parlé ; il avait mandé le ministre de Prusse et s’était ouvert à lui. Il l’avait chargé de faire part à son roi des motifs qui le déterminaient à nous céder le Luxembourg, et il l’avait prié de réclamer son assentiment. Son cœur était soulagé ; il se sentait en règle avec la Prusse, il lui restait à s’expliquer avec la France. Il écrivit aussitôt à l’empereur pour justifier sa démarche et lui demander d’aplanir les difficultés à Berlin. M. de Zuylen, de son côté, pour atténuer l’indiscrétion du roi et nous donner un témoignage de bon vouloir, nous annonçait qu’il s’appliquait à obtenir de M. de Bismarck des garanties contractuelles au sujet du Limbourg, et à bien établir qu’aucune solidarité n’existait entre le gouvernement hollandais et le gouvernement luxembourgeois ; il nous promettait de signer les deux conventions dès qu’il se serait mis en règle avec Berlin. Comptait-il sérieusement sur le succès des démarches qu’il prescrivait à M. de Bylandt ? Il n’y était guère autorisé par l’expérience du passé. M. de Bismarck n’avait en tout cas aucun intérêt à se prêter à ses désirs. « Le Limbourg, d’après ce qu’il avait dit dans le temps à M. Benedetti, était un excellent moyen de pression pour déterminer le gouvernement néerlandais à nous céder le Luxembourg. » Il était aujourd’hui une carte dans son jeu qui devait lui permettre d’amener la Hollande, si les circonstances le commandaient, à rompre avec la France.
M. de Bismarck en s’expliquant avec M. de Bylandt n’hésitait pas à reconnaître que le parlement avait en quelque sorte exclu le Limbourg du territoire fédéral en ne le mentionnant pas dans la constitution, mais il demandait encore à réfléchir avant de signer le projet de convention qu’on lui proposait. Il se réservait en outre la liberté d’apprécier publiquement suivant les circonstances la cession du grand-duché, tout en admettant que le roi des Pays-Bas était