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siège à Top’Hané a été constituée pour étudier toutes les demandes de concessions faites au gouvernement turc. Cette commission est connue à Constantinople sous le nom de commission de Top’Hané, à cause du lieu où elle réside, mais on la désigne plus généralement sous le nom de « commission des pompes funèbres » à cause de la fonction qu’elle remplit. Il faut reconnaître qu’elle s’en acquitte à merveille. Jamais enfouissemens n’ont été plus complets que les siens. Si, cependant, une demande de concession pouvait se sauver de ses mains, il ne faudrait pas croire que tout fut gagné : le conseil des ministres et le sultan l’enterreraient certainement, car la commission est consultative et ses décisions n’ont que l’autorité d’un avis. Mais pareille chose ne s’est point encore vue. Depuis que la commission est réunie, elle n’a pas une seule fois manqué à sa mission. Son président, Namyk-Pacha, est un Turc fort spirituel, qui parle admirablement le français et qui fait des mots dans toutes les langues. Avec lui, on n’est pas exposé à subir la mort sans phrase, on la subit même quelquefois avec calembour : ce qui est du moins une consolation pour les gens d’esprit.

Pour donner une idée de la manière de procéder de la commission de Top’Hané, il me suffira de résumer en quelques mots l’histoire d’une entreprise importante qui lui a été soumise et qui en est morte, celle des mines d’Héraclée. Les mines sont exploitées en Turquie sous la direction d’une administration gouvernementale, d’où il résulte qu’elles ne rapportent absolument rien. C’est ce que constate le rapport officiel sur le budget de 1276 (1880-1881). « Les mines, dit ce rapport, qui, comme celui d’Hassan-Fehmi, énonce les meilleurs principes, quitte à n’en tenir aucun compte dans la pratique, les mines sont une source importante de revenus, et, convenablement gérées, elles contribueraient dans une large mesure à l’accroissement des ressources du trésor. Mais l’expérience et l’étude démontrent que ce résultat ne peut être obtenu au moyen de l’exploitation directe par l’État… Nous nous permettons de signaler à V. A. I. (le rapport est adressé au sultan) un passage du rapport de la commission des dépenses, qui démontre que les mines exploitées par l’État n’ont en effet rien rapporté jusqu’à présent et qu’elles occasionnent le plus souvent des pertes sur le capital engagé dans ces exploitations… Le ministère du commerce et de l’agriculture sera donc chargé de concéder les mines séparément et à des conditions favorables aux concessionnaires les plus sérieux. » On ne saurait mieux dire ni mieux conclure, et voilà encore des principes excellens ! La commission internationale qui avait étudié, en 1879, l’état matériel de la Turquie s’exprimait ainsi de son côté : « La Sublime Porte conserve la propriété de plusieurs houillères et mines de métaux dont elle a entrepris et poursuit tant bien que