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son milieu, et il est creusé d’un entonnoir. Sur la lune, les éminences centrales n’ont aucune régularité : ce sont des masses rugueuses, irrégulières, jamais évidées et qui semblent plutôt rocheuses. Sur la terre il n’y a point de volcans sans coulées de lave, et l’on n’en connaît aucune sur la lune ; enfin nos volcans produits par une poussée intérieure sont des montagnes élevées, de peu d’étendue, tandis que les plateaux qui occupent l’intérieur des éminences lunaires sont immenses, plus étendus qu’un de nos départemens et toujours en contre-bas de la surface extérieure. Pour employer la spirituelle expression de M. Faye, « ils ressemblent à des volcans comme un puits à une montagne. » Et puis, en supposant que ces objections soient levées, on n’aurait résolu que la moitié de la question, il faudrait chercher la cause qui a si souvent crevé la surface de la lune et qui s’est montrée si rarement sur la terre.

Tout devient clair, tout se prévoit et s’explique, si le relief actuel est considéré comme portant les traces des coups que la lune a reçus et qu’elle continue de recevoir. Examinons ce qui va se passer quand elle est rencontrée par un bolide ; prenons-le d’abord très petit, ne pesant qu’un kilogramme. A peine a-t-il touché la surface et commencé à pénétrer dans le sol qu’il perd sa vitesse, qu’une énorme quantité de chaleur prend naissance, et elle est instantanée comme l’arrêt de mouvement ; elle fond, rougit et volatilise à la fois le bolide et l’obstacle qu’il a rencontré et avec une rapidité telle que c’est une explosion, une bombe qui éclate en tombant. Nous avons déjà calculé cette chaleur, elle suffirait pour élever à 100 degrés 12,000 kilogrammes d’eau, pour former 2,000 kilogrammes de vapeur à 5 atmosphères : on peut juger de l’effet, et concevoir qu’une simple étoile filante, inoffensive sur la terre, fait dans la lune un large trou rond avec explosion, projection de matières à l’extérieur, et se creuse un petit cratère ; et si tel est l’effet de la chute de 1 kilogramme, on imagine aisément celui de masses plus grandes. La météorite trouvée en. Sibérie par Pallas pèse 700 kilogrammes, c’est du fer pur, son volume ne dépasse pas 100 litres ; il n’est point entré dans la terre en y tombant, parce qu’il a été arrêté par l’air, mais sur la lune il aurait instantanément développé assez de chaleur pour produire 1,400,000 kilogrammes de vapeur à 5 atmosphères ; il aurait creusé un cratère assez grand pour être vu de la terre. Multipliez encore la masse, supposez un bolide beaucoup plus gros, même une comète, vous n’aurez aucune difficulté à expliquer la formation des plus grands cirques, vous comprendrez comment on en trouve de toutes les tailles, comment les plus petits sont plus nombreux que les grands ; vous expliquerez également la