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de manger des richesses énormes sans rien faire ; voilà le spirituel qu’ils (les prêtres) regrettent si fort.

Un Paysan. — Je ne m’étonne pas qu’ils soient si méchans.

Le père Gérard. — Ce n’est point de religion qu’ils parlent à nos femmes ; ils les étourdissent de chimères. C’est toujours la damnation éternelle qu’ils ont dans la bouche ; car ils damnent tous ceux qui ne sont pas de leur avis. L’enfer leur est d’un grand secours pour leurs mauvais desseins. C’est dans les flammes d’enfer qu’ils voudraient jeter tous les patriotes ; c’est au feu d’enfer qu’ils voudraient brûler la constitution ; c’est toujours le diable qu’ils mettent de leur parti.


Extrait du Catéchisme historique et révolutionnaire :

Les nombreuses trahisons de ce roi parjure et couvert de crimes (Louis XVI) lui avaient fait perdre depuis longtemps la confiance et l’amour du peuple ; mais depuis la journée à jamais mémorable du 10 août 1792, le seul souvenir de son nom inspirait un frémissement d’horreur dans tous les esprits ; les mânes des patriotes égorgés aux Tuileries criaient vengeance, la liberté l’exigeait, et la France entière ne cessait de la réclamer…

Le dimanche, vers les deux heures de l’après-midi, le ministre de la justice, accompagné du maire de Paris, du procureur de la commune et du procureur-général syndic du département, se transportèrent à la tour du Temple, où ils trouvèrent Louis Capet dans un état assez tranquille. Le ministre de la justice lui fit lecture du décret qui le condamnait à subir la mort, le lendemain matin. Il pria seulement le ministre de demander à la convention nationale un sursis de trois jours afin de lui donner le temps de se préparer à la mort, et, à cet effet, il demanda pour se confesser un prêtre irlandais, domicilié rue du Bac ; après quoi il se mit à dîner avec le même sang-froid qu’à l’ordinaire et sans faire paraître la moindre affectation, parce qu’il savait bien que son supplice ne pouvait jamais égaler ses forfaits.

Le ministre s’acquitta de la mission dont il avait été chargé ; il fut à la convention nationale faire la demande du sursis ; mais l’assemblée considérant que la loi doit être la même pour tous et que l’homme, quel qu’il soit, qui connaît le terme fatal de sa mort, la souffre mille fois pour une en attendant le moment qui doit couper le fil de sa vie, a pensé que l’humanité lui imposait le devoir rigoureux de maintenir son premier décret en passant à l’ordre du jour sur la demande du sursis…

Santerre ordonna avec sagesse et prudence aux tambours de continuer leur roulement et aux exécuteurs de remplir leur devoir. Cet ordre fut aussitôt exécuté que donné : les exécuteurs se saisirent de Capet, l’emmenèrent à la planche fatale, sur laquelle il prononça ces mois d’un ton de voix haute et distincte pendant qu’on l’attachait :