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de la Russie. Les blocs de Finlande ont été transportés avec leurs arêtes vives jusqu’à Twer et aux alentours de Moscou, à 150 lieues de leur lieu d’origine. On en a même observé en Pologne qui auraient parcouru 250 lieues. Des blocs de grès, dont quelques-uns mesurent jusqu’à 840 mètres cubes, ont été rencontrés en Poméranie. D’autres à Memel proviennent des bords du lac Onega et se trouvent situés à 245 lieues de leur point de départ. Il existe en même temps une proportion décroissante, comme si les blocs les plus considérables avaient échoué les premiers. Près de Moscou, le diamètre des fragmens de granit et de diorite excède rarement un mètre, tandis qu’il est souvent de plusieurs mètres à Saint-Pétersbourg. Si donc, comme on est en droit de l’admettre, de l’aveu des géologues régionaux, à la suite d’un abaissement de tout le nord de l’Europe, les plaines septentrionales de ce continent ont été submergées par une mer peu profonde et faiblement salée du milieu de laquelle les massifs Scandinaves se dressaient, couverts de glaciers, les icebergs qui s’en détachaient et qui flottaient ensuite dans la direction du sud ont dû transporter et disséminer les blocs qu’ils entraînaient avec eux et les déposer en échouant. En prenant Stockholm comme un point central, la limite de la dispersion des blocs décrirait une demi-circonférence dont le rayon allant jusqu’au-delà de Moscou ne serait pas moindre de 280 lieues.

D’après Erdmann, la Scandinavie aurait éprouvé, pendant la durée du quaternaire, des mouvemens oscillatoires et modifié à plusieurs reprises ses contours et son relief. — M. Geikie, s’attachant à la région britannique, distingue plusieurs âges et plusieurs états successifs. A l’époque du « Forest-bed » de Norfolk, le sud de l’Angleterre, joint au continent et jouissant d’un climat relativement doux, avec un relief supérieur d’au moins 300 mètres au relief actuel, est fréquenté par les grands mammifères qui peuplaient alors le reste de l’Europe. Ensuite se prononce la première invasion glaciaire; la mer gagne sur les terres et la glace elle-même empiète sur cette mer. Un premier retrait permet aux icebergs de flotter librement. Après diverses oscillations qui laissent entrevoir à M. Geikie le voisinage de la mer et la présence d’un climat tempéré, un retour offensif des glaciers de l’Ecosse, s’étendant jusqu’au nord de la Tamise, marque une période de froid rigoureux suivie d’un retour à la chaleur qui a pour effet de dissoudre les glaces et de favoriser la colonisation des espèces méridien îles d’animaux et de plantes. M. Geikie admet ensuite la marche en avant d’un nouveau glacier allant jusqu’au Lincolnshire, dans la direction du sud et à la vallée de la Severn à l’ouest. La disparition de ce glacier, après avoir ramené un climat tempéré, aboutirait finalement à une dernière