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visites auraient un sens profond, qu’elles doivent avoir pour résultat de faire entrer l’Italie dans la grande alliance continentale, de lui donner ce puissant rempart d’une grande alliance européenne contre un ennemi qu’on ne nomme pas.

Eh bien ! soit, admettons que les rencontres impériales qui ont eu lieu déjà à Gastein soient suivies d’une autre rencontre du roi Humbert avec les souverains d’Autriche et d’Allemagne : les Italiens sont certainement libres de se procurer le plaisir de ces manifestations. Seulement ils ne s’aperçoivent pas qu’ils courent le risque de faire beaucoup de bruit pour rien ou de se tromper dans leurs calculs. Ils ne pourraient s’allier sérieusement avec l’Autriche et l’Allemagne qu’en leur donnant des garanties ; ils ne pourraient donner ces garanties que par le désaveu péremptoire de toute prétention sur le Tyrol, surTrieste, et moyennant cela qu’auraient-ils obtenu ? Ils seraient arrivés simplement à être les protégés des deux empires contre un danger imaginaire, contre un ennemi qui n’existe pas. Car enfin à qui en ont-ils ? qui les menace dans leurs possessions et les trouble dans leurs droits ? où est pour eux la nécessité de se donner tant de mouvement, de paraître rechercher des appuis et se mettre en défense ? Franchement c’est un peu trop s’agiter pour un petit mécompte éprouvé à Tunis. Les Italiens, pour leur avantage et pour l’avantage de tout le monde, auraient une politique bien plus simple à suivre : ce serait de ne point exagérer la portée d’un voyage royal qui, s’il se réalise, ne sera vraisemblablement qu’un acte de haute courtoisie, de ne pas laisser dire imprudemment qu’il faut armer les Alpes, d’éviter tout ce qui pourrait affecter des relations que personne en France ne songe à troubler. Les hommes prévoyans et habiles qui ont de l’influence au-delà des Alpes sentent, tout comme les Français bien inspirés, la nécessité d’en finir avec des malentendus que rien de sérieux ne justifie, qui ont déjà trop duré. Au lieu de se perdre en querelles ou en manifestations inutiles, que ne se met-on simplement, franchement à négocier ce traité de commerce dont les gouvernemens ont aujourd’hui à s’occuper, qui, en assurant des satisfactions, des garanties mutuelles aux intérêts des deux pays, peut aider au rapprochement des politiques ?

Il y a quelques jours à peine, l’Espagne comme la France était en plein mouvement électoral, et au-delà des Pyrénées comme de ce côté, le même jour, le 21, les élections se sont accomplies. Tout n’est pas fini encore, il est vrai, puisque le scrutin ne s’ouvrira que dans quelques jours pour la nomination d’une partie du sénat espagnol soumise à l’élection. Pour la chambre des députés du moins le vote est dès ce moment complet et décisif. Il est décisif en ce sens que le résultat, prévu d’avance d’ailleurs, est entièrement favorable au gouvernement. Le ministère, depuis six mois, n’a cessé de se préparer en toute