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mais en 1824, le navire la Coquille, que commandait le capitaine Duperrey, abordait à la baie des Iles. L’état-major comptait, parmi ceux qui se vouaient à l’étude, un jeune officier de l’esprit le plus distingué, Jules de Blosseville, qu’une fin mystérieuse a rendu tout particulièrement sympathique[1]. Blosseville profita du séjour à la Nouvelle-Zélande pour acquérir de nouvelles notions géographiques. Les informations furent recueillies près de certains chefs connus pour avoir porté loin les armes de leur tribu et surtout près d’un vieux guerrier qui, sans façon, avait élu domicile sur la cornette française. De la sorte, on apprit les noms indigènes de différentes localités, bientôt substitués sur les cartes aux appellations imposées par les Anglais. On obtint en outre des missionnaires et de quelques capitaines de bâtimens de pêche, des indications qui, à cette époque, n’étaient pas sans prix. Blosseville enregistre nombre de faits touchant les havres et les baies de l’île du Nord[2] ; il note, d’après le chef insulaire installé à bord de la Coquille, l’existence d’un grand lac au centre de l’île; il signale plusieurs rivières et apprend que la Tamise de Cook est le fleuve Houraki des aborigènes. Te Wahï-Poumanou, l’île du sud, alors très fréquentée par les chasseurs de phoques et les baleiniers, se montrait en grande partie déserte. On n’avait rencontré de peuplades qu’aux deux extrémités de l’île et à la côte occidentale, au voisinage du fameux canal de la Reine-Charlotte. D’après les observations de quelques marins anglais, on put décrire différens havres de l’île Stewart[3].

Tandis que le pavillon français flotte à la baie des Iles, le capitaine Edwardson, chargé par le gouvernement de la Nouvelle-Galles du Sud de recueillir le phormium[4], donne dans la baie Chalky, à l’autre extrémité de la Nouvelle-Zélande. Au mois de novembre, il voit les hautes montagnes couvertes de neige; en ce temps, il trouve les bois si fourrés qu’ils sont impraticables; on n’avance dans les terres qu’en suivant le lit des torrens. Edwardson change de mouillage et découvre plusieurs matelots d’un navire américain. Ces pauvres gens, qui étaient dans le plus triste dénûment, avaient été déposés sur la côte au nombre de douze pour chasser les phoques. Peu après, les indigènes ayant reconnu l’endroit où l’on serrait les provisions, s’étaient emparés des vivres, tuant le jeune

  1. Le commandement de la Lilloise avait été donné à J. de Blosseville pour une exploration des mers arctiques. Les circonstances de la perte du navire et de la mort de tous ceux qui le montaient sont demeurées ignorées.
  2. La baie des Iles est la baie d’Ipiripi ; la baie de Lauriston de Surville; Doubtless bay de Cook est la baie Oudou-Oudou.
  3. Les baies Milford, Chalky, Preservation, Marquarie, Snapper, Williams. (Jules de Blosseville, Mémoire géographique sur la Nouvelle-Zélande. Nouvelles Annales des voyages, t. XXIX; 1826.)
  4. La plante textile dont la filasse est comparable au lin.