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Le conflit resta aussi animé, aussi violent que le premier jour. Le 2 décembre, l’adresse fut votée et portée à Elisabeth par vingt-cinq pairs, trente membres des communes et les deux évêques de Durham et de Londres. Elle se contint vis-à-vis des pairs, s’emporta contre les membres des communes et injuria les deux évêques, leur reprochant de l’avoir traitée de bâtarde ; puis répondant à Bacon, qui avait porté la parole pour tous, elle affirma que ceux qui prétendaient qu’elle ne voulait pas se marier en avaient menti ; quant à sa succession, elle leur répondit par une de ces phrases ambiguës et inintelligibles dont elle avait le secret. Ils s’étaient bien avancés pour se contenter de si peu, mais elle avait plus de fermeté qu’eux ; elle leur enjoignit de passer à l’ordre du jour et, dans la séance du 15 décembre, ils reculèrent et obéirent. Dans celle du 2 janvier suivant, elle réduisit fort habilement sa première demande de subsides, y glissa quelques mots heureux en faveur de leurs privilèges et de leurs libertés qui flattèrent leur amour-propre. Le subside fut voté, l’accord se rétablit et, le parlement ayant été prorogé le 5 janvier, elle recouvra toute sa liberté.

À la fin d’octobre, au plus fort de sa lutte contre le parlement, M. de Brienne, en allant en Écosse, fut reçu par elle. Une heure durant, elle l’entretint de Charles IX, s’informant de son genre de vie, de ses passe-temps et de ses chasses, mais elle ne fit aucune allusion au passé, elle ne revint pas sur la réponse décisive qu’elle avait faite tout récemment à Castelnau de Mauvissière : « Votre roi est trop petit et trop grand ! »


HECTOR DE LA FERRIERE.