Page:Revue des Deux Mondes - 1881 - tome 46.djvu/832

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
VOYAGE EN SYRIE

IMPRESSIONS ET SOUVENIRS[1]


VIII. — BETHLEEM. — VALLEE DE JOSAPHAT. — MONT SION. — MONT SCOPOS. — TOMBEAU DES ROIS. — SAINT JEAN DANS LA MONTAGNE.

Aller de Jérusalem à Bethléem est une simple excursion ; on peut la faire à cheval en deux heures par une route pittoresque, quoique sévère et singulièrement mal entretenue. Il ne faut pas songer à user de voiture ; les essieux les plus solides se briseraient vingt fois sur les rochers qui obstruent le chemin. L’aride Judée, avec ses vallées pierreuses, ses montagnes dénudées, ses campagnes stériles, inspire une invincible tristesse ; jadis les environs de Bethléem étaient renommés pour leur fertilité ; c’est à une heure de la ville environ que se trouvent les vasques de Salomon et l’emplacement des fameux jardins où le roi philosophe célébrait la vanité du monde et le charme du plaisir, au milieu des vignes, des vergers arrosés par les piscines, des parterres de lis, de safran et de cinnamome, des retraites mystérieuses et fleuries dont il avait fait, suivant l’expression du Cantique des Cantiques, « un tapis d’amour pour les filles de Jérusalem. » Que reste-t-il aujourd’hui de ce tapis ? La roche nue dans la plus âpre des solitudes. Je ne sais quel vent de mort et de désolation a passé sur cette riante contrée où la poésie orientale s’est imprégnée de ses plus brillantes couleurs. Bethléem n’offre rien de remarquable aux regards dés visiteurs. A part la basilique de la Nativité, elle ressemble à tous les villages de la

  1. Voyez la Revue du 15 mai, du 15 juin et du 15 juillet.