l’immobilisation d’une notable partie des fonds des caisses d’épargne ; que la prudence commandé, au contraire, de tenir toujours disponibles. Une somme de 200 millions, provenant des caisses d’épargne, fut transformée, par décision ministérielle, en obligations du trésor à l’échéance de cinq ans. Quels ne seraient pas les embarras du gouvernement si, par suite d’événemens imprévus, d’une crise industrielle ou simplement d’une panique, les demandes de remboursement venaient à se multiplier soudainement et dans une proportion considérable ? Le moindre délai dans le paiement des livrets porterait au crédit public une atteinte irréparable ; et cependant il ne serait possible de faire face aux remboursemens qu’en négociant la signature du ministre des finances. Un autre expédient a consisté à demander des avances temporaires à la Banque de France : ces demandes d’avances étaient des emprunts véritables, emprunts tout à fait irréguliers puisqu’ils avaient lieu sans l’autorisation préalable et même à l’insu des chambres ; ils étaient contraires tout à la fois à la législation financière et aux statuts de la Banque. L’irrégularité de ce procédé ayant été reconnue, on tourne maintenant la difficulté en émettant des obligations à terme qu’on invite la Banque de France à acquérir. Il est incontestable que la Banque, qui a le droit d’acquérir des rentes perpétuelles, peut tout aussi bien acheter et mettre dans son portefeuille des fonds à échéance fixe ; mais il en résulte un nouvel élément d’obscurité dans la situation financière : le compte courant du trésor à la banque ne donne plus, comme autrefois, la mesure exacte des rapports de l’état avec notre grand établissement financier, puisque rien ne fait connaître si le trésor a épuisé l’avance gratuite de 140 millions qu’il a droit de demander ou s’il en a remboursé une partie, et que rien n’indique non plus si le trésor n’a pas fait porter à son compte courant, concurremment avec des recettes réelles, le montant des obligations à terme que la Banque a été invitée par lui à acquérir. Des critiques chagrins pourraient dire que, si la lettre de la loi est observée, l’esprit n’en est pas respecté. Les économistes et les hommes d’état, qui regardent l’indépendance de la Banque comme une nécessité de premier ordre, qui verraient avec les plus vives appréhensions que cet établissement fût transformé peu à peu en un simple instrument de trésorerie, s’inquiéteront plus encore de savoir quel degré de liberté est laissé à l’administration de la Banque pour accepter ou refuser les propositions du ministre des finances.
Préoccupé de reculer le terme de ses engagemens, le gouvernement a successivement porté de quatre années à cinq, puis à six, l’échéance des obligations du trésor : l’obligation à six ans qu’on appelle, par un néologisme financier, l’obligation sexennaire, est maintenant le type consacré. Mais on a eu beau reculer l’échéance, ces