Les écoles de santé. — Il existait avant la révolution, sans compter les cours publics d’accouchement établis dans beaucoup de provinces en vertu de l’ordonnance de 1770, trente facultés ou collèges de médecine[1] qui, sous un rapport au moins, celui de la quantité, suffisaient largement à tous les besoins. Mais il n’y avait pas un seul de ces établissemens où « les principes de l’art de guérir fussent enseignés dans leur entier. » À Paris même, on ne trouvait cette instruction complète qu’en réunissant à grands frais les cours particuliers que plusieurs professeurs habiles donnaient dans leurs maisons. Des examens trop faciles et, par conséquent, presque nuls multipliaient le nombre des docteurs ignorans et des charlatans avides. » Telle était, d’après Fourcroy, la situation de la médecine en France sous l’ancien régime. Si défectueuse qu’elle fût, pourtant, cette situation n’approchait pas de celle qui nous est révélée par les documens postérieurs à la suppression des universités.
« L’ignorance effroyable des sages-femmes ordinaires, dit un de ces documens[2], et leur témérité doivent faire désirer à toutes les âmes sensibles que nos sages législateurs fassent cesser un fléau qui désole principalement nos campagnes, et qui moissonne tous les ans un grand nombre de victimes de l’impéritie et du charlatanisme des matrones qui y sont répandues. » Et ailleurs : « Voici comment ces sages-femmes parviennent à leurs fonctions : lorsqu’il manque une matrone dans une commune, soit par mort ou empêchement quelconque, les commères s’assemblent et choisissent une d’entre elles pour la remplacer. Autrefois, le choix était présenté à l’approbation du curé de la paroisse, qui l’adoptait, et la sage-femme était faite. Aujourd’hui, ce sont les officiers municipaux qui sont devenus les approbateurs juges. Très peu de ces femmes savent lire et écrire, presque aucunes n’ont de dispositions pour l’emploi auquel on les destine et aucunes ne reçoivent nulle espèce d’instruction propre à les mettre au fait de l’état qu’elles doivent exercer. »
« Dans tous les cantons de la république, écrit encore le chef de la deuxième division du ministère de l’intérieur[3], on voit des hommes sans études exercer la médecine, la chirurgie et la pharmacie. Partout la santé et la vie des citoyens crédules et confians deviennent le jouet de l’impéritie, du charlatanisme et de l’avarice. Cette funeste licence est une suite de l’abolition des jurandes, mais, en affranchissant l’industrie de ses entraves, le législateur n’a pas voulu dispenser des travaux qui créent la science, de l’expérience qui la développe, ni des sages précautions que réclame la sûreté