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On essaya d’abord de la périodicité annuelle. De 1737 à 1747, les salons se succèdent sans interruption, mais, en 1747, le public se plaignit du nombre des ouvrages et de leur médiocrité. de la médiocrité, passe encore, nous n’en savons rien, mais du nombre, cela nous semble un peu fort, à nous qui affrontons au minimum des étalages de deux mille et parfois de quatre mille tableaux. Le salon en comptait alors, bon an mal an, deux cents en moyenne. Le directeur des bâtimens, M. Lenormand de Tournehem, soumit l’affaire au roi : « Il suffiroit, dit-il, que le salon se réduisît tous les ans à cent cinquante tableaux exquis, » Quelques jours après, il envoyait ses instructions à Coypel. « Le 17 du mois d’aoust, tous les tableaux que les membres de l’Académie voudront exposer seront transportés dans la galerie d’Apollon. Ils seront rangés de manière qu’on soit à portée de les bien voir. On convoquera pour le lendemain une assemblée particulière composée premièrement du directeur, des quatre recteurs et des deux adjoints à recteurs. L’assemblée nommera encore à la pluralité des voix un ancien professeur, six professeurs, trois adjoints à professeur, et deux conseillers. Ces officiers réunis examineront scrupuleusement et sans passion les tableaux présentés et, par la voie du scrutin, supprimeront ceux qui ne leur paraîtront pas dignes d’être mis sous les yeux du public. » Telle fut l’origine de l’institution dû jury, qui devait fonctionner jusqu’à la révolution. M. Guiffrey remarque justement qu’on avait, du premier coup, imaginé, pour sa formation, partie par des membres de droit, partie par des membres élus, la combinaison à laquelle on devait revenir cent ans plus tard, après mille tâtonnemens, chaque fois qu’il s’agirait d’une exposition universelle ou de tout autre grand concours solennel. Malgré le fonctionnement de ce jury, les expositions parurent si faibles qu’on décida en 1751 de les rendre biennales ; elles n’eurent plus lieu, en effet, que tous les deux ans jusqu’en 1791.

Les procès-verbaux de l’Académie, la correspondance des bâtimens du roi, les livrets publiés depuis 1737, laissent deviner à quelles sortes de difficultés intérieures on se heurtait fréquemment. La plus grande de toutes avait été, nous l’avons vu, celle d’obtenir un local convenable. Le séjour même du Louvre ne fut pas, en tout temps, un séjour tranquille. Suivant les circonstances, on errait de la grande galerie dans la galerie d’Apollon et de la galerie d’Apollon dans le salon carré. Le salon carré ne tarda pas à devenir aussi un séjour insuffisant. Il n’est sorte de plaisanterie qu’on ne trouve dans les feuilles du temps sur cette déplorable installation.

Il est au Louvre un galetas,
Où dans un calme solitaire,
Les chauves-souris et les rats
Viennent tenir leur cour plénière.