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il joint les enseignemens plus purs et plus élevés du christianisme. Dans son programme, l’étude et la pratique de la religion occupent peut-être, après le latin, la place la plus considérable. Faire d’honnêtes gens ne lui suffit pas ; former de pieux chrétiens, voilà le but suprême à atteindre, la fin dernière de toute bonne pédagogie.

Il y a loin de cette pédagogie, de cette large façon de comprendre les humanités aux critiques étroites et bornées qu’on rappelait tout à l’heure, et vraiment, si l’on peut considérer le Traité de Rollin comme l’expression exacte des études à la fin du XVIIe et jusqu’au milieu du XVIIIe siècle, il est difficile de se défendre d’un sentiment pénible en songeant à l’âpreté des griefs auxquels ont succombé nos collèges et nos universités et qui pèsent encore sur leur mémoire.

Est-ce à dire qu’il n’y eût pas d’urgentes et nombreuses réformes à introduire dans ces établissemens ? Non, certes, on ne le prétend pas. Si prospères qu’ils fussent et quelques fruits qu’ils eussent donnés, ils devaient nécessairement se transformer ou disparaître. L’ancienne organisation des études avait fait son temps, comme beaucoup d’autres choses. Le cadre en était devenu trop juste. À cette société du XVIIIe siècle, éprise de nouveautés, affolée de mouvement, insatiable de progrès, il fallait d’autres écoles, un enseignement plus varié, plus en rapport avec les aspirations et les idées régnantes, moins exclusivement littéraire. Il fallait que cet enseignement s’élargît et se complétât, qu’il s’ouvrît plus libéralement à l’esprit philosophique, aux sciences, à l’histoire, aux langues vivantes. On a dit que le latin était gentilhomme ; ce qui est certain, c’est qu’il ne répondait plus aux besoins de l’époque.

L’enseignement de l’histoire et de la philosophie surtout commandait une refonte complète. Sous le rapport de l’histoire, on n’avait pas avancé d’un pas depuis Rollin en 1789 ; on ne consacrait un peu de temps qu’à l’histoire romaine ; on en était encore « à en trouver pour s’appliquer à celle de France. » Elle n’avait guère été l’objet d’un enseignement sérieux que dans les collèges des jésuites, où régnait déjà le Précis du père Daniel, celui-là dont Voltaire a dit que, sans être au rang des grands écrivains, il était certainement « à celui des meilleurs historiens. »

Sous le rapport de la philosophie, on était peut-être un peu moins arriéré. Grâce aux efforts d’un des plus éminens prédécesseurs de Rollin dans le rectorat, Pourchot, la scolastique avait cédé la place aux principes essentiels du cartésianisme ; cependant elle se défendait encore et non sans succès dans plus d’une université.

Comment aussi laver les universités des reproches que leur ont valus leurs tendances rétrogrades, leur puéril attachement à des