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découverte, et l’on n’était pas sans soupçonner avant eux l’existence d’une organisation telle quelle de l’instruction primaire. La collection des ordonnances royales et synodales, celle des actes et décisions des conciles, abondent en témoignages de la sollicitude et des efforts que la royauté française et le clergé déployaient de concert pour l’éducation du peuple. Dès le moyen âge, ce zèle s’était affirmé par des actes significatifs. Le concile de Latran, entre autres (1179), avait ordonné que chaque église cathédrale eût un maître chargé d’instruire gratuitement les clercs et les écoliers pauvres et qu’un écolâtre fût établi dans les autres églises et monastères, injonction souvent renouvelée par les papes et les conciles postérieurs. Mais c’est surtout à partir du XVIe siècle que se marque dans l’église et chez nos rois la préoccupation d’instruire le peuple et que cette préoccupation devient vraiment une affaire d’état. En face de la réforme menaçante, l’église se discipline et se réorganise. Le concile de Trente s’ouvre et les jésuites naissent. Dans le même temps, la royauté fait appel à toutes les forces vives de la nation. Contre Luther et Calvin, elle dresse ses parlemens, ses universités, les petites écoles elles-mêmes. Le magister de village devient une puissance avec laquelle il faut compter, un levier, l’auxiliaire naturel du gouvernement dans sa lutte contre l’hérésie. Déjà, pendant les guerres de religion, il apparaît avec ce caractère. Avec Louis XIV, après la révocation de l’édit de Nantes, son rôle s’élargit et se précise encore.

« Voulons, lisons-nous dans une ordonnance de 1698, que l’on établisse autant qu’il sera possible des maîtres et des maîtresses dans toutes les paroisses où il n’y en a point pour instruire tous les enfans et nommément ceux dont les pères et mères ont fait profession de la religion prétendue réformée, du catéchisme et des prières qui sont nécessaires, pour les conduire à la messe tous les jours ouvriers, leur donner l’instruction dont ils ont besoin sur ce sujet et pour avoir soin pendant le temps qu’ils iront auxdites écoles qu’ils assistent au service divin les dimanches et les fêtes ; comme aussi pour apprendre à lire et à écrire à ceux qui pourront en avoir besoin, le tout en la manière prescrite par l’article 25 de notre édit d’avril 1695 concernant la juridiction ecclésiastique, ainsi qu’il sera ordonné par les archevêques et évêques, et que dans les lieux où il n’y aura pas d’autres fonds, il puisse être imposé sur tous les habitans la somme qui manquera pour leur subsistance jusqu’à celle de 150 livres pour les maîtres et 100 livres pour les maîtresses.

« Enjoignons à tous les pères, mères, tuteurs et autres personnes qui sont chargées de l’éducation des enfans… de les envoyer