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RAPPORT
FAIT AU ROI
PENDANT SON VOYAGE DE GAND A PARIS[1]


Juin 1815[2].


Sire,

La France, en avril 1814, était occupée par trois cent mille hommes de troupes étrangères, que cinq cent mille autres étaient prêts à suivre. Il ne lui restait au dedans qu’une poignée de soldats qui avaient fait des prodiges de valeur, mais qui étaient épuisés.

  1. Nous détachons de la Correspondance inédite du prince de Talleyrand et du roi Louis XVIII pendant le congrès de Vienne, publiée avec éclaircissemens et notes par M. G. Pallain, qui va paraître à la librairie Plon, le Mémoire si vivant, présenté par M. de Talleyrand au roi pendant qu’il revenait de Gand à Paris. En remettant ce Mémoire, M. de Talleyrand déclarait ne pouvoir rester aux affaires que si le roi en acceptait l’esprit général et les conclusions; c’était donc une démission conditionnelle. Le roi avait paru tenir compte du programme de M. de Talleyrand, qui avait fait sur lui une bien vive impression, puisque sa proclamation du 7 juillet, datée de Cambrai en reproduisait des fragmens presque entiers. Mais, de retour à Paris, et Napoléon en route pour Sainte Hélène, Louis XVIII se laissa ressaisir par d’autres influences, et bien peu de temps après, le 26 septembre 1815, M. de Talleyrand donnait sa démission définitive.
    Ce Mémoire est particulièrement intéressant parce qu’il donne une idée de ce qu’eût pu être à cette époque un ministère Talleyrand.
  2. « A Roye, on tint conseil. M. de Talleyrand fit attacher deux haridelles à sa voiture et se rendit chez Sa Majesté. Son équipage occupait la largeur de la place, à partir de l’auberge du ministre jusqu’à la porte du roi. Il descendit de son char avec un mémoire qu’il nous lut : il examinait le parti qu’on aurait à suivre en arrivant. »
    (Chateaubriand, Mémoires d’outre-tombe, t. VI, p. 388.)