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dès leur arrivée? — Qui n’a vu dans un poulailler des myriades d’insectes achever les poussins malades et respecter les bien portans, ou encore les herbivores logeant par milliers les larves de mouches parasites qui dominent ou sont dominées selon l’état général de l’animal?

M. Prosper de Lafitte dit qu’il faut du temps, beaucoup de temps pour savoir ce que vaut la résistance de chaque cépage. Vingt ans lui suffisent-ils ? En ce cas, les jacquez de M. Borty, à Roquemaure[1], pourraient être acceptés comme résistans, et à eux seuls repeupler le Midi. Puis le jacquez étant un estivalis créé par un estivalis, comparativement plus délicat que son aîné l’herbemont, nous pourrions, ce me semble, accepter celui-là aussi et par extension raisonnée tous les estivalis purs d’hybridations européennes.

Mais là encore reparaissent les malices de l’adaptation, qui ne permettent pas au norton’s Virginia une fructification normale dans notre région.

Les gens qui, comme moi, aiment à croire et désirent croire, acceptent la théorie d’un sérieux viticulteur du Texas, qui divise les estivalis en trois groupes, prospérant chacun dans une zone différente, mais se conservant dans toutes : le norton au nord, le jacquez au sud, le rulander au milieu, l’herbemont presque dans les trois. Inutile de cataloguer et diviser toutes ces variétés, dont la grande culture n’a que faire quant à présent. Lorsque nous aurons atteint le bien, nous chercherons le mieux; en attendant, raffermissons-nous dans ce qui est acquis et conservons-le.

Je lis encore : « Tel cépage vit depuis tant d’années avec le phylloxéra dans telles conditions de climat, de sol, de culture, mais rien ne permet de dire combien de temps il a encore à vivre. » Moi je dis : Si la durée connue est assez longue pour que les frais de plantation et d’entretien soient largement dépassés pendant la période de résistance connue et qu’on puisse de la sorte assurer un revenu annuel et rémunérateur à la terre, plantons et espérons; car d’abord cela rapportera plus qu’un statu quo timoré, et ensuite qui peut dire si un végétal qui a vécu déjà dix ans, vingt ans, ne dépassera pas ces limites?

Quant aux taches observées ici, là,.. phylloxériques ou autres, je réponds : J’ai une vigne dans laquelle plusieurs variétés se suivent par rangées parallèles et traversent un point rond qu’on pourrait croire phylloxéré, car toutes y faiblissent, sauf l’herbemont, et encore! Mais avant d’être vigne, ce champ accusait la même tache dans l’orge, le maïs, les betteraves, etc.;.. eux aussi étaient froissés dans leur adaptation.

Quant à la question engrais, cause de résistance, je dirai peut-être un

  1. Près d’Avignon.