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fusil partirait par inadvertance. Lorsque les canonnières eurent repassé la barre, le Magellan, qui venait d’arriver devant Tampico, prit à son bord les débris de la garnison, composée de trente officiers et cent soixante-seize hommes de la contre-guérilla; quatre-vingts officiers, vingt et un hommes de cavalerie et trente hommes d’infanterie mexicaine, trente femmes et enfans appartenant plus ou moins à ces troupes, et quinze réfugiés civils divers. La tranquillité se rétablit d’ailleurs assez vite à Tampico pour que le consul, M. de Saint-Charles, et l’agent des paquebots transatlantiques pussent engager le capitaine de la Sonora à remonter devant la ville et à faire ses opérations comme auparavant. Le commerce de Tampico se consola facilement de nous voir partir, car les routes devenaient libres par l’intérieur, et quels que fussent les droits à payer, il y avait de gros bénéfices assurés. Si le port de Tampico restait ouvert, il allait devenir un des principaux ports, au grand détriment de Vera-Cruz, par où entraient les marchandises étrangères.

L’évacuation de Tlacotalpam suivit de près la chute de Tampico. La ville était attaquée le 10 août. L’attaque avait été repoussée, mais le colonel Camacho n’espérait pas résister plus longtemps et paraissait complètement découragé. Il avait deux cent cinquante hommes malades et blessés, le reste démoralisé. L’autorité mexicaine de Vera-Cruz lui envoyait enfin des instrumens de chirurgie, mais point de munitions pour son artillerie. C’était dérisoire. La Tempête, occupée à garder Alvarado, ne pouvait communiquer avec lui et ne passait d’ailleurs le Conejo qu’avec de très grands risques. Cela ne pouvait durer. L’évacuation fut résolue. On récoltait ainsi ce qu’on avait semé, car le commandant Cloué n’avait laissé ignorer à personne que toute garnison laissée à Tlacotalpam pendant l’hivernage était fatalement vouée à la mort et que, pour ces motifs, les dissidens eux-mêmes en 1864 avaient dû évacuer la ville après l’avoir reprise. La Pique, la Tempête, la Tactique et la Diligente partirent d’Alvarado et, se soutenant les unes les autres pour affronter l’artillerie du Miadéro et du Conejo, remontèrent à Tlacotalpam. En passant au Conejo, la Tactique eut un boulet à la flottaison et la Pique ses plaques de blindage de mousqueterie traversées par un boulet qui blessa un homme assez grièvement. Elle semblait avoir le monopole de ces sortes de mésaventures.

Le colonel Camacho et M. Gaude, le capitaine le plus ancien de la Tempête, arrêtèrent les dispositions à prendre pendant la journée de suspension des hostilités convenue entre le général Garcia et le colonel Camacho. Le 18, l’évacuation avait lieu, laborieuse et