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à bâbord des deux, car on n’attendait d’attaque que de tribord. Mais l’ennemi avait établi une batterie à bâbord, à l’endroit appelé Las Piedras. Ayant leur artillerie disposée pour tribord, les canonnières durent essuyer le feu de cette batterie, à laquelle le Mosquito seul put répondre. Au même moment, les pièces du sud et de l’ouest du fort Iturbide, qui n’avaient pas eu encore occasion de tirer, ouvrirent leur feu sur les canonnières qui avaient dépassé le tournant du fleuve et qui arrivèrent ainsi sous la ville, où elles furent accueillies par un autre feu très vif de canon et de mousqueterie partant des barricades. Les canons rayés des canonnières eurent bientôt engagé l’ennemi à cesser son feu et à se tenir à l’abri. Les canonnières se turent elles-mêmes. La ville étant bâtie en amphithéâtre, il était impossible de voir Casamata. On savait de plus les troupes libérales fort nombreuses. Tenter de communiquer de vive force avec les nôtres dans une pareille situation était à peu près impraticable. Le lieutenant de vaisseau Révault, commandant la Diligente et le plus ancien des trois capitaines, fit hisser le pavillon blanc et convint avec ses deux collègues que si, dans une heure, personne n’était venu, on amènerait le signal de trêve et on ouvrirait de nouveau le feu contre la ville. Cela allait être fait, quand le général Pavon envoya un de ses officiers parler au capitaine Révault. Celui-ci, se fiant avec une énergie singulière à la simple parole d’honneur des Mexicains, se fit conduire à la caserne de l’Octavo, où était M. Langlois, apprécia la position désespérée de cet officier et parvint, non sans peine, il est vrai, à le convaincre qu’une plus longue résistance ne conduirait à rien et que le mieux à faire était d’accepter les conditions les plus honorables qui aient jamais été obtenues. Il est certain que, n’ayant pas le millier d’hommes nécessaire pour occuper et garder Tampico, il n’y avait rien de mieux à faire que de se retirer avec tous les honneurs de la guerre et de ne pas compromettre, pour un résultat impossible, la vie de braves soldats. Suivant la convention qui fut dressée, les troupes s’embarquèrent le lendemain, à trois heures, emmenant même avec elles deux canons-obusiers de 12. Pour rendre les honneurs aux soldats de M. Langlois, les troupes mexicaines, au nombre de deux mille cinq cents hommes, étaient rangées en ligne sur tout le parcours et dans le plus grand ordre. Elles avaient très bonne mine. Ce n’étaient pas des bandes, mais bien des troupes avec lesquelles il fallait compter. Le général Pavon fut d’une courtoisie parfaite et avait pris toutes ses mesures pour éviter un conflit, ce qui était nécessaire, car la contre-guerilla avait accumulé bien des haines contre elle dans les environs de Tampico. Il avait menacé ses soldats de faire fusiller même celui d’entre eux dont le