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et résolu qu’il ne remettrait jamais la ville à un misérable tel que Carbajal et que, si on l’attaquait, il saurait montrer qu’il était toujours Mejia.

Le lendemain, n’ayant pas été attaqué, il céda aux sollicitations des habitans et consentit à partir. Il s’en allait attristé, moins vaincu que découragé par l’inutilité de cette lutte d’un an qu’il avait soutenue et s’étant acquis les sympathies et les regrets des Mexicains et des étrangers. C’était le 24 juin. Pendant que Mejia partait, le consul de France et toutes les personnes compromises se réfugiaient à Brownsville. En rade de Bagdad, Mejia avait trouvé l’Adonis et s’y était embarqué avec un certain nombre de troupes mexicaines et trente personnes de sa suite.

En résumé, Mejia avait quitté Matamoros en y abandonnant toute son artillerie de trente pièces de canon en parfait état avec toutes les munitions. C’était pour les libéraux un succès dont le contre-coup se fit immédiatement sentir partout à la fois. Des troupes chaque jour plus nombreuses se portèrent sur Tampico. Déjà les libéraux avaient enlevé Panuco et y avaient fait un massacre général. De là ils s’étaient portés sur Tampico, qu’ils serraient de très près; Tuspan était tout à fait compromis. Tout le pays aux environs, sans en excepter cette fois la moindre ville, s’était prononcé contre l’empire, ce qui n’avait pas eu lieu depuis trois ans. Le district de Temapache lui-même, qui avait toujours fourni les plus braves soldats et les meilleurs défenseurs à Tuspan, s’était jeté dans les bras de l’ennemi. Il est vrai que de Mexico on écrivait au commandant Cloué : « Ne vous préoccupez pas de Tuspan, » auquel cependant on n’envoyait ni munitions ni soldats, tandis que l’ennemi, parfaitement approvisionné, faisait une énorme consommation de pondre. Les troupes de la garnison n’étaient plus payées et menaçaient de passer aux libéraux. Le préfet espérait tenir cinq jours, et le commandant lui expédiait la Tactique avec deux cents hommes de Mejia qui devaient aller à Tampico si Tuspan était pris à leur arrivée.

Tlacotalpam était également dans la situation la plus triste. L’ennemi tenait la campagne et coupait les vivres à la ville. Il forçait les rancheros à emmener leurs troupeaux de bœufs dans l’intérieur à tel point que l’approvisionnement de Vera-Cruz était menace. L’eau douce manquait, car l’ennemi était maître de la source d ou on l’apportait à Tlacotalpam. La garnison et les habitans ne buvaient plus que l’eau saumâtre du fleuve. Les communications avec Alvarado devenaient extrêmement difficiles, l’ennemi ayant maintenant une pièce au Conejo et une au Miadero, et devant en avoir bientôt deux autres qu’il faisait venir de Minatitlan. Il était rare que la Pique ou la Tempête ne reçussent pas, en passant,