Page:Revue des Deux Mondes - 1881 - tome 44.djvu/443

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de Juarez n’eût pas mieux dit. À ce moment, au 17 mai, le colonel Camacho avait cinquante-trois malades et perdait l’appui de la chaloupe l’Augustine, qui courait trop de dangers à faire le trajet de la rivière. Elle devait même, pour aller à Alvarado, dans ce dernier voyage, être abritée à bâbord de la Pique. On avait une autre raison de la rappeler à Vera-Cruz. C’était de remplacer la seconde chaloupe l’Amélie, qui ne pouvait plus aller sans réparations. Le 15 mai, avant le jour, sur les trois heures du matin, Tlacotalpam était enfin attaqué par des forces considérables. L’ennemi s’était avancé jusqu’aux barricades aux cris de : « Vive la république ! » entendus des canonnières. Un obus heureux de la Diligente avait paru déterminer sa retraite en incendiant en même temps cinq ou six cabanes en paille situées dans les faubourgs. Pendant cette attaque, un feu très nourri, partant de la rive opposée, avait été dirigé sur les canonnières. La Pique avait eu un homme grièvement blessé. Déjà, ce même jour, en venant d’Alvarado, et en passant sous le Miadéro, elle en avait eu deux autres atteints. La retraite de l’ennemi n’était que momentanée. Dès le même soir, il tiraillait aux avant-postes et tenait en éveil la garnison harassée de fatigue. La troupe de Figuerero s’était bien comportée, un peu trop bien. Elle avait hissé sur une de ses défenses un pavillon avec un emblème de mort et ces mots : « Nous ne voulons pas de quartier; nous ne ferons pas de quartier. » Cette résistance vigoureuse et prolongée devait recevoir sa récompense. Au commencement de juin, l’ennemi était moins pressant. En même temps, on envoyait des renforts au colonel Camacho, mais quels renforts ! Cent hommes envoyés de Mexico et que les désertions à leur arrivée à Vera-Cruz avaient réduits à soixante-quinze, et dans ces soixante-quinze il y avait vingt-sept sous-officiers et caporaux et quarante-huit prisonniers faits à l’intérieur. C’étaient ces gens-là que l’on envoyait à Tlacotalpam pour y défendre la cause de l’empire. Trois compagnies rurales levées près de Vera-Cruz étaient un peu meilleures. Il y avait enfin une centaine de bons fusils, des munitions et des médicamens, deux obusiers de 12 non rayés. Il y avait aussi la saison des pluies, alors complètement prononcée, et qui protégeait la ville contre l’ennemi, car on souffrait moins de l’inondation à Tlacotalpam que les libéraux sous les bois ou en rase campagne; on pouvait donc jusqu’à un certain point et en comptant sur la fermeté dont le colonel avait donné des preuves, s’autoriser des circonstances pour lui retirer l’appui constant des canonnières. La Pique et la Diligente furent rappelées, et la Tempête seule, qui continuait sa station à Alvarado, dut aller de loin en loin à Tlacotalpam.

Cette résistance de Tlacotalpam était une exception dans la façon