Page:Revue des Deux Mondes - 1881 - tome 44.djvu/380

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

manquer de lui envoyer des secours; il oublia surtout que la population de Bannes, celle de Berrias, lui étaient dévouées, qu’elles l’avaient prouvé en lui faisant passer des vivres. Après avoir échangé avec les assiégeans une fusillade qui coûta la vie à trois de ceux-ci, il se prêta à des pourparlers en vue d’une capitulation. En pareil cas, ouvrir l’oreille aux propositions de l’ennemi, c’est s’avouer vaincu. Le 7 juillet, on délibéra de part et d’autre, des lettres furent échangées. Enfin, le 8, la capitulation fut signée sans avoir été précédée d’aucune tentative de résistance.

Elle portait que la garnison de Bannes se retirerait en emportant ses armes et bagages, qu’elle suivrait la grande mute pour se rendre aux Vans, que ses chevaux lui seraient restitués et qu’elle ferait, en se retirant, évacuer tous les postes non royalistes. Il était en outre stipulé que le chevalier de Melon la protégerait jusqu’à sa destination. Ces décisions s’exécutèrent conformément au traité qui les résumait, et le château de Bannes fut livré au comte de Saillans. Il s’empressa d’en prendre possession. Cette victoire était inattendue. Elle étonna les vainqueurs eux-mêmes et indigna les autorités légales, surprises par cet échec au moment où elles se préparaient à attaquer énergiquement l’insurrection. Elles dénoncèrent à l’assemblée nationale le capitaine de Bois-Bertrand en demandant qu’il fut traduit devant une cour martiale.

C’est dans ces circonstances que le général d’Albignac était arrivé à Joyeuse. Il releva les courages abattus, se concerta avec le lieutenant-colonel Aubry, qui commandait les troupes de l’Ardèche. Il fut décidé que celles-ci resteraient dans leurs positions, mais que celles que le général d’Albignac avait laissées à Saint-Ambroix marcheraient non sur le château de Bannes, mais sur Saint-André-de-Cruzières, où les royalistes se fortifiaient pour défendre la plaine de Jalès. Puis, il revint sur Saint-Ambroix par le long chemin qu’il avait suivi déjà et engagea ses opérations sans tarder.

Malheureusement, ces mesures suprêmes ne furent pas considérées par les patriotes comme suffisantes à laver l’injure qu’ils avaient reçue. Irrités et avides de vengeance, ils se portèrent sur les Vans pour en chasser les contre-révolutionnaires et s’y fortifier. Cette petite ville était le rendez-vous d’un grand nombre de prêtres réfractaires. Ils y travaillaient pour la cause royale. En apprenant que l’armée marchait contre elle, la population se souleva, se partagea en deux camps. Des scènes tragiques s’ensuivirent. Les royalistes menacés se réfugièrent dans le presbytère, tandis que les patriotes opéraient des perquisitions dans toutes les maisons suspectes pour y découvrir les rebelles. Le presbytère ne fut pas à l’abri de ces recherches. Ceux qui s’y trouvaient voulaient résister; ils n’en eurent ni les moyens ni le temps. On les arrêta et parmi