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la part des ouvriers et des surveillans. C’est dans les conditions qu’une explosion se produisit un peu avant midi, déterminant la mort de huit hommes et blessant sérieusement cinq autres ouvriers. L’enquête établit que le grisou avait été enflammé par l’imprudence et l’insouciance d’un mineur qui, après avoir pris son repas, s’endormit en laissant sa lampe accrochée au parement au-dessus de sa tête. Le grisou, en brûlant dans la lampe, porta le tissu au rouge blanc et communiqua l’inflammation au mélange environnant. L’ouvrier endormi passa de vie à trépas sans faire un mouvement, et sa lampe fut retrouvée accrochée à la place où il l’avait mise. Le treillis était recouvert d’une couche adhérente de charbon cokefîé.

Une autre circonstance peut aggraver et déterminer ces accidens, c’est la vitesse du courant d’air qui incline la flamme et la met en contact avec le treillis qui s’échauffe. On a fait sur ce point, dans tous les pays, des expériences absolument concordantes, exécutées d’abord en Angleterre, à Eppleton et à Hetton, reprises par une commission royale en Belgique vers 1868, par une réunion d’ingénieurs constituée à Saint-Étienne, et enfin par MM. Mallard et Lechatelier au nom de la commission du grisou. Toutes ont démontré que les lampes de tous les systèmes mettent le feu quand les vitesses d’air dépassent 2 mètres environ par seconde et qu’elles ne sont efficaces que pour le cas où la marche de l’air ne dépasse pas 1m,70 ou 1m,80 environ. On voit qu’en réalité la lampe de Davy perd ses qualités quand la ventilation dépasse une certaine vitesse.

Et puis elle offre un grave inconvénient, elle éclaire très peu. La lumière de la lampe passe par les trous, mais elle est arrêtée par les fils, et comme la toile métallique offre 1/5 de vide pour 4/5 de plein, l’éclairement se trouve réduit au cinquième. C’est une cause pressante de danger parce que l’ouvrier mal éclairé est à chaque instant tenté d’ouvrir sa lampe pour mieux y voir.

Pour ces diverses raisons, les ingénieurs ont mis à perfectionner la lampe autant de persévérance qu’ils avaient d’abord montré de respect à la conserver intacte. Le premier en date est un ouvrier nommé Roberts, qui garnissait la partie inférieure du treillis d’un verre cylindrique afin d’éviter la sortie de la flamme. Il y réussissait, mais en diminuant le pouvoir éclairant déjà si faible. Puis un Français, le baron du Mesnil, n’hésita point à remplacer totalement le cylindre en toile métallique par un large tube de verre. Plus tard, un inventeur belge, M. Mueseler, place le cylindre de verre en bas, autour de la flamme, conserve au-dessus le tube en treillis métallique et garnit sa lampe d’une cheminée centrale qui active le tirage. Enfin, chacun se mettant à l’œuvre, on compte aujourd’hui jusqu’à 95 modèles différens. Celui de Mueseler a été imposé en