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de 20,000 hommes de pied et de 2,000 chevaux, — grosse armée pour la Grèce et avec laquelle il semble qu’on puisse tout tenter. Un premier avantage remporté sur les Macédoniens, non loin du mont Corax et du Pinde, dans les défilés de l’Étolie, contribue encore à monter les têtes ; Agis se croit déjà sûr du succès. Se rabattant vivement sur l’Arcadie, il va mettre le siège devant Mégalopolis. La place est investie ; pour peu que l’armée de secours se fasse attendre, la reddition de cette clé du Péloponèse est certaine.

Dans ces graves conjonctures, Antipater fit preuve de plus de sang-froid que Parménion n’en avait montré aux champs d’Arbèles. Il expédia sans doute de nombreux courriers à son maître ; il ne songea pas du moins à presser le retour d’Alexandre en Europe. A quoi bon d’ailleurs trahir ainsi un trouble dont le roi de Macédoine se fût plus tard raillé ? Les instances d’Antipater, en pareil cas, ne devaient-elles pas demeurer superflues ? Le vainqueur d’Issus et d’Arbèles ne pouvait avoir pour les avis d’un lieutenant qui tenait de lui seul une autorité révocable la déférence qu’avait eue le roi Agésilas pour les ordres des éphores. Antipater se prépara donc à faire face de son mieux aux difficultés de la situation. La question de Thrace se viderait plus tard ; l’essentiel était de réprimer sur-le-champ le mouvement de la Grèce. Ménon consent à traiter, Antipater accorde sans marchander le prix que le dangereux rebelle veut mettre à sa soumission. L’armée macédonienne est ensuite ramenée à marches forcées sur le théâtre où l’appellent de plus grands débats ; Antipater la grossit en route de tous les contingens des villes alliées qui n’ont pas encore pris parti pour Sparte. Rentré en Macédoine, il fond sur l’Arcadie à la tête de 40,000 hommes.

Depuis près de trois mois Agis tenait la campagne. Peut-être, à la première annonce du retour d’Antipater, eût-il dû se résigner à lever le siège de Mégalopolis ; les gorges du Taygète lui auraient offert un terrain plus favorable à la lutte inégale qu’il allait être forcé d’accepter. Agis paraît avoir compté sur la force de sa position. On n’assiégeait pas alors les villes sans les entourer d’une ligne de circonvallation. Appuyé sur ces retranchemens, maître des hauteurs, le roi de Sparte ne s’effraya pas outre mesure de la supériorité numérique de l’ennemi. Au lieu de décamper, lorsqu’il en était encore temps, il prit le parti d’attendre l’attaque d’Antipater dans ses lignes. Les premiers assauts des Macédoniens furent vigoureusement repousses ; Antipater se vit obligé de faire donner ses réserves. L’armée de Lacédémone commençait à perdre du terrain quand Agis accourt avec la cohorte royale. Tout plie devant ces soldats, les plus braves de la Grèce. L’ennemi découragé redescend précipitamment les pentes qu’il a gravies ; il entraîne à sa suite