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ajoutait-t-il, lui donnerait une base solide d’opérations sur les derrières de l’armée qui manœuvrerait dans la vallée du Pô. Vainqueur sur le Pô, l’ennemi ne pourrait laisser de côté une forteresse si importante, qui serait une menace perpétuelle sur ses flancs. » On s’est donc efforcé de rendre la Spezzia inattaquable par un ennemi descendu des Alpes comme par une armée débarquée.

Parmi les îles du golfe on remarque, dès l’entrée, une assez grande terre, c’est Palmaria, qui surgit près du rivage occidental. L’accès en est assez difficile, la position dominante ; on l’a fortifiée. Mais aujourd’hui les vaisseaux passent devant un fort et peuvent en recevoir la volée sans avarie irréparable. Ce n’est plus comme au temps où leur marche dépendait du vent et de la mer. Poussés par la vapeur, ils vont droit et rapidement à leur but, en tout temps, de nuit comme de jour. Un vaisseau ne reste pas plus de quelques minutes dans l’aire des canons. C’est à peine si les artilleurs ont le temps de charger deux fois leurs pièces avant que le bâtiment se trouve hors de portée. On compterait donc souvent en vain sur des batteries croisant leurs feux pour arrêter l’essor d’un vaisseau qui passe. Aussi ce genre de protection est-il maintenant considéré comme insuffisant si son action n’est pas secondée par d’autres moyens défensifs. La navigation du golfe de la Spezzia est entravée contre l’ennemi par une digue pleine, comme à Cherbourg, et qui s’étend d’un rivage à l’autre. Abrité par ces ouvrages, l’arsenal, au fond de la baie, est à peu près hors d’atteinte par mer. Comme protection contre des troupes débarquées aux environs, il y a des forts et des canons qui battent la route le long du rivage et surtout, du côté de l’intérieur, où, comme nous l’avons dit, la chaîne des Apennins envoie des contre-forts.

Telle est la Spezzia ; une véritable forteresse propre à toutes fins, également redoutable pour l’attaque et pour la défense. C’est le plus considérable des ouvrages militaires que l’Italie ait entrepris, depuis son affranchissement, pour protéger son indépendance et préparer au besoin ses expéditions à l’étranger.


II

L’Italie a d’autres ports de guerre : Naples et Venise.

L’arsenal de Naples est encore tel que les Bourbons l’ont laissé avec son annexe de Castellamare. Il suffit jusqu’à présent à la construction des plus grands bâtimens, et pourtant il est fort négligé. Les approvisionnemens de matériaux ; bois, fer et charbon, y sont très peu considérables. Le charbon est emmagasiné dans des caves qui s’étendent sous la ville. Des combustions spontanées y sont à craindre. Un bombardement y pourrait produire les effets les