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finirent par en décider quelques-uns et, tant de Bafoulabé queues autres pays qu’il avait traversés, il ramena à Saint-Louis le fils du chef du Kita, le fils de l’un des chefs de Bamako, un proche parent du chef de Bakhoy, un représentant de Gara, l’instigateur de la révolte qui assiégeait Oualiha, le fils du chef du Natiaga, un délégué de Tiecoro, qui tenait à témoigner de son désir, — probablement peu sincère, — de nous voir nous établir à Bafoulabé, qui dépend de son territoire, enfin le fils du chef Bambarra Dama, qui s’est établi avec une assez forte colonie de ses compatriotes aux environs de Bakel. Tous ces gens furent comblés de caresses et de cadeaux par le gouverneur et repartirent enchantés de Saint-Louis, au mois de décembre, sauf les fils des chefs de Kita et de Bamako, réservés comme guides pour une nouvelle mission.

M. Gallieni était accompagné pendant son voyage par M. Vallières, lieutenant d’infanterie de marine, qui était chargé de faire la carte du fleuve et le croquis des terrains, genre de travaux auxquels il excelle. Ce jeune officier a recueilli les élémens d’une belle carte du haut fleuve, que dans un second voyage dont nous allons parler, il a pu prolonger beaucoup plus loin. Les difficultés inhérentes aux pays montueux que le chemin de fer aura commencé à rencontrer de Bakel à Médine s’accentueront au-delà de ce dernier point. Le Logo forme une belle plaine éminemment propre à la culture des arachides, mais aux environs de Médine même, autour de Mansonnah, capitale du Natiaga et près du mont Moumania, il y aura des obstacles difficiles à franchir. En revanche, le bois de construction et les pierres abonderont sur toute la ligne. Le Logo peut contenir actuellement cinq mille habitans environ et le Natiaga trois mille. Au-delà, le pays est désert, mais des ruines, de nombreux vestiges de forges où l’on fondait les minerais de fer du mont Moumania attestent qu’il n’en a pas toujours été de même. La terre est fertile, c’est la guerre qui en a éloigné les hommes. Près de Bafoulabé même, existe un petit village appelé Makhina de deux cents habitans environ. Bafoulabé est un mot malinké qui indique un confluent ; dans le cas qui nous occupe, il désigne le point où les deux rivières le Bakhoy et le Bafing se réunissent pour former le Sénégal. Il ne s’y trouve point de village indigène.

Notre arrivée étant ainsi bien préparée, le gouverneur poussa activement l’occupation de ce dernier point. Dès le mois de septembre, il avait envoyé à Médine les cinquante hommes destines à en former la garnison. Il y avait expédié en outre une centaine de fusils doubles pour armer les travailleurs. Les tirailleurs sénégalais venaient d’échanger cette arme contre le fusil Gras, et il s’en trouvait ainsi heureusement une certaine quantité dans les magasins. Les mois d’octobre et de novembre furent employés à monter à