Page:Revue des Deux Mondes - 1880 - tome 42.djvu/684

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

préparer, au point de vue politique, l’accès vers les régions du Haut-Niger. Par une convention, passée le 28 septembre avec le Logo, et une autre passée le 1er octobre 1879 avec le Natiaga, les habitans de ces deux pays exprimèrent le repentir de leur conduite passée et leur reconnaissance pour le gouverneur qui leur rendait leur territoire, se replacèrent sous la protection de la France et renouvelèrent les engagemens qu’ils avaient contractés précédemment par le traité du 30 septembre 1855. Ils promirent en même temps de fournir des travailleurs pour la route qu’on se proposait de construire.

L’actif officier arriva à Bafoulabé le 12 octobre, et trouva le pays dans un état singulièrement favorable à sa mission. Tous les chefs malinkés du Haut-Sénégal, révoltés contre Ahmadou, étaient réunis à une journée à peine au-dessous de Bafoulabé. Ils assiégeaient le tata d’Oualiha, possession du chef indigène Tiecoro, qui s’était fait musulman au moment du passage d’El-Hadji-Omar et qui depuis n’avait pas cessé de tenir pour son maître et pour son successeur. M. Gallieni ne crut pas pouvoir aller à Oualiha ; il désirait garder les apparences d’un simple explorateur et ne point se compromettre auprès d’Ahmadou ; il craignait en effet, si la place tombait au moment de sa présence dans le camp, de paraître coopérer à un acte d’hostilité contre les Toucouleurs. Mais il fit prier les chefs de venir à un rendez-vous. Ceux-ci, après avoir obligé ses envoyés à boire de l’eau-de-vie pour se convaincre qu’ils n’avaient pas affaire à des adeptes de l’Islam, se rendirent à son invitation. Tous accueillirent avec un grand empressement le projet d’installer les Français au milieu d’eux, et notamment à Bafoulabé. L’horrible état de guerre et d’incertitude dans lequel ils vivent depuis trente ans est un sûr garant de leur sincérité à ce sujet ; ils savent bien que nous leur donnerons la paix : nous avons contre nous les pillards et les gens de désordre, pour nous tous les gens laborieux. Les Malmkés du Bambouk, du Bakhoy, du Bafing et de Kita, les Peuls du Fouladougou assurèrent à notre officier que notre arrivée serait accueillie avec joie dans le pays. Le fils du chef de Kita insista même pour que la résidence de son père fût immédiatement choisie pour l’emplacement de l’un des nouveaux postes que nous nous proposions de construire. Il s’offrit en outre à guider une expédition jusqu’à Bamako[1] quand on le voudrait. M. Gallieni demanda aux chefs d’envoyer des délégués auprès du gouverneur pour conférer avec lui ; ils refusèrent d’abord en disant que tout le monde se devait au siège commencé, mais ses instances

  1. Mungo-Park écrit Bamakou, Caillé Bamako. Bamakou a prévalu jusqu’à présent. D’après M. Bayol, on prononce Bamako dans le pays. Nous revenons donc définitivement à cette orthographe.