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pas pour empêcher que ce surcroît n’accable ! Il y a danger pour les maîtres eux-mêmes de dépasser, en poursuivant leurs études personnelles sur ces matières, les vraies limites de leur domaine, car la géographie physique, première base de tout cet enseignement, est une science qui leur appartient à peine ; ils n’ont pas non plus à se transformer ni à transformer leurs élèves en économistes, en statisticiens, en géologues, en météorologistes, en hydrographes, en agronomes. — Et d’autre part quelle riche matière pour attirer et charmer les esprits ! Descriptions de beautés naturelles, peintures de mœurs, récits d’expéditions lointaines et de voyages de découverte, notions élémentaires d’économie politique, d’administration, voire même de finance et d’agriculture, combien d’attraits pour cette utile faculté, la curiosité d’esprit, que l’enseignement purement littéraire pourrait, en certains cas, ne point assez exciter ! Tout cela est soumis à la difficile condition que le maître se soit assimilé tant de connaissances de manière à les traduire clairement et sobrement. S’il sait en faire une quintessence, il sera étonné de la capacité des jeunes intelligences. Le succès en une telle entreprise aura un très grand prix ; mais l’insuccès sera très nuisible, étant de nature à doubler la somme d’accablement et d’ennui que peut déjà causer dans nos classes l’enseignement de l’histoire mal compris et mal pratiqué.

Si l’on doit attendre des futurs professeurs qu’ils témoignent de tant de qualités à la fois, qui les y préparera ? Comment aura lieu le bon recrutement de nos concours, qui intéresse si fort l’enseignement secondaire et l’enseignement supérieur à la fois ? C’est ici qu’il convient de signaler les salutaires efforts de l’administration supérieure de l’instruction publique pour assurer la préparation plus sérieuse que jamais de nos épreuves. Il y a d’une part l’école normale ; la sévérité de ses méthodes, le dévoûment de son directeur et de ses maîtres de conférences, l’ardeur de ses élèves, nous assurent l’appoint de fortes études qui maintiendra et fera monter le niveau des concours universitaires. Mais en dehors de cette grande école, il y a, dispersé par toute la France dans l’enseignement libre ou dans les lycées et collèges, tout un personnel de candidats d’autant plus intéressant qu’il a le plus souvent acquis, à ses risques et périls et sans beaucoup de secours, une utile expérience et une instruction considérable. De ce personnel si digne d’estime sont sortis plus d’une fois nos premiers agrégés. Rien ne serait plus mérité ni plus utile que de lui offrir les moyens d’une préparation vraiment efficace.

C’est le résultat que produiront et qu’ont déjà commencé de produire les récentes mesures. Des bourses dites de licence, puis d’agrégation, permettent à des jeunes gens de suivre pendant