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Cette cruelle mutilation de l’université dura huit années, après lesquelles le rétablissement du concours spécial fut en grande partie l’œuvre d’un savant à qui ses belles études sur l’histoire du droit avaient donné depuis longtemps une grande autorité, et qui, après avoir été ministre de l’instruction publique, s’était retiré sans être oublié. M. Ch. Giraud, de concert avec un ministre de bon sens, M. Rouland, soutint dans le conseil supérieur et fit triompher en 1860, malgré beaucoup de préventions subsistantes, la cause de l’agrégation d’histoire, en attendant que, bientôt après, M. Duruy revendiquât celle de philosophie. M. Giraud fit plus : il introduisit dans ce concours une épreuve excellente, l’explication des textes, dont nous parlerons tout à l’heure ; il y fit rentrer l’ancienne épreuve des thèses ; il consentit enfin à le présider pendant quinze ans, jusqu’en 1874. Nous lui devons ainsi une grande part de l’organisation actuelle d’un des ressorts les plus utiles de notre enseignement universitaire. Le concours s’est développé depuis lors avec une remarquable énergie ; de récentes dispositions tendent à l’agrandir et à le fortifier encore. Voyons comment il est constitué, à quelles nécessités il doit répondre, de quels développemens il est capable, et de quelle nature est l’influence qu’il exerce sur notre enseignement historique.


II

Il est absolument nécessaire, si l’on veut apprécier ou seulement comprendre l’économie et le mécanisme de ce concours, de savoir avant tout quel en est l’objet et ce qu’il veut être. Doit-il recruter exclusivement l’enseignement secondaire, ou bien en même temps l’enseignement supérieur ? — Cette question en suppose une autre, d’une réelle importance : l’un et l’autre domaines doivent-ils être soigneusement séparés par une préparation différente et un recrutement à part ? L’enseignement supérieur doit-il se confondre avec la culture de la science, et l’enseignement secondaire doit-il y renoncer ? Il n’a pas manqué de réponses excessives à chacune de ces questions, qu’il importerait de résoudre avec modération et justesse, sous peine d’imprimer des directions très regrettables.

Qu’un galant homme, d’esprit et de goût, à la parole nette et vive, au travail d’assimilation prompt et facile, voué par profession et par goût à l’enseignement de l’histoire, ami de la jeunesse, se tienne au courant, par une lecture constante, des principales publications historiques en France et à l’étranger ; qu’il fasse passer avec aisance dans son enseignement, sans cesse renouvelé, tous les résultats acquis : il exercera un attrait, une séduction