Page:Revue des Deux Mondes - 1880 - tome 42.djvu/346

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

pendant les épreuves de ce siège la bravoure de sa race, sortit de Poitiers et alla rejoindre le duc d’Anjou. Celui-ci avait aussi levé le siège de Châtellerault ; on tournait le dos aux murailles et l’on allait encore une fois en venir aux mains en bataille rangée. Les Suisses disaient tout haut qu’ils ne voulaient pas servir pendant un nouvel hiver si on ne leur accordait la bataille ; les Allemands de Coligny, qui n’étaient point payés, la demandaient aussi ; les gentilshommes étaient las. Le 25 septembre Pfyffer, écrivait de Chinon : « Que Dieu et sa sainte mère Marie fassent cette grâce à notre jeune prince et à nous, que nous puissions en finir d’une fois, car cette guerre coûte cher à bien des pauvres gens de toutes nations, et il y a dans ce pays de tels gémissemens et une telle misère que cela fait mal au cœur. » Ce même jour, le duc d’Anjou passait la Vienne avec son armée et se mettait en marche sur Loudun. Les Suisses partaient en tête avec l’artillerie et six mille hommes de pied ; la cavalerie suivit le lendemain. Coligny avait fait mine de prendre la direction de Châtellerault, puis se retournant brusquement, il arriva le 30 septembre de bonne heure à Saint-Clair, près de Moncontour avec six mille cavaliers français et allemands et douze mille hommes de pied. Il commandait lui-même l’avant-garde, Ludovic de Nassau était avec la bataille.

Le 3 octobre, les deux armées se trouvèrent en présence, ayant chacune à dos un pays hostile, dans la plaine qui sépare Moncontour de Mirebeau. L’armée royale, lit-on dans les Mémoires de Tavannes, était ainsi formée : « Il range les bataillons et escadrons d’un front, celui des Suysses aucunement advancé, duquel il avoit couvert les flancs d’arquebusiers et chariots, entremeslé les nations ; sur le flanc droit un régiment de gens de guerre françois, un de reistres et un autre d’Italiens ; sur la gauche deux de cavalerie française et au milieu un de reistres, fait un ost de réserve, conduict par M. de Cossé, qu’il met derrière les Suisses, l’artillerie advancée sur les deux coings, proche laquelle étoit l’infanterie, l’aisle droite en forme d’avant-garde, conduict par M. de Montpensier, la gauche, qui étoit la bataille, par Monsieur… L’armée des huguenots étoit de mesure estendue, les lansquenets et les arquebusiers au milieu, l’amiral conduisoit l’avant-garde sur le flanc droict, et le comte Ludovic commandoit à la bataille au flanc gauche. »

Le régiment de Cléry, réduit à deux mille hommes, était à l’aile droite, avec deux régimens d’arquebusiers, la cavalerie allemande et un peu de grosse cavalerie française sous Guise et Martigues ; le régiment de Pfyfrer, au grand complet, était dans la bataille avec le duc d’Anjou, en deux phalanges dont l’une servait de réserve à l’autre. La première phalange était renforcée de deux mille chevaux français, de deux mille chevaux allemande et des