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de rendre les résultats favorables… Jamais auparavant, dans l’histoire du monde, la mortalité des hôpitaux militaires ne fut si faible en temps de guerre, et jamais ces hôpitaux ne furent aussi complètement garantis des maladies qui y prennent naissance. »

Jusqu’à cette époque, l’organisation de la chirurgie militaire des armées européennes était, dans ses grandes lignes, calquée sur la nôtre ; les deux exemples, si opposés, dans leurs résultats, de la France en Crimée, en Italie, et des États-Unis pendant la guerre de la sécession devaient éclairer les gouvernemens, — à l’exception du nôtre, — sur la nécessité d’une réforme radicale. La Prusse, dès 1863, l’Autriche en 1864, la Russie, l’Angleterre, l’Italie, le Portugal, l’Espagne, et récemment la Belgique, ont affranchi leur chirurgie militaire du joug de l’intendance et donné au corps médical cette autonomie que nous ne cesserons de réclamer pour la médecine militaire française. L’expérience du Schleswig, en 1864, de la guerre de Bohême en 1866, consacra l’utilité de ces réformes, faites d’abord avec une certaine réserve, et quelques états ont remanié plusieurs fois leur organisation sanitaire, mais toujours dans le sens d’une plus large et plus libre action du corps médical militaire. L’Autriche, après avoir modifié en 1870 son règlement de 1864, a promulgué en 1878 un ordre impérial réglementant dans tous ses détails le service de santé militaire. La Prusse, par l’ordonnance de 1863, avait réformé son organisation, jusque-là copiée sur la nôtre ; l’expérience de 1866, le désir incessant du progrès qui caractérise l’Allemagne, amena la grande réforme de 1868. La guerre franco-allemande montra qu’il y a toujours place pour des améliorations : de là les ordonnances de 1873 sur le service en temps de paix, de 1878 sur le service en campagne. L’Angleterre, dont l’organisation sanitaire était déjà si libérale, a, par les décrets du 1er janvier et du 1er février 1878, étendu encore les attributions du corps médical.

Il est cependant un pays qui a suivi à cet égard, mais sur un point seulement, une marche rétrograde ; ce pays, c’est l’Espagne. Les règlemens du 19 mai et du 1er septembre 1873 donnaient au corps médical, dans les ambulances et dans les hôpitaux, une autonomie complète. Pendant une longue guerre civile qui a mis sur le pied de guerre une armée de plus de deux cent mille hommes, pas une seule épidémie n’a été observée ; la proportion des malades n’a pas dépassé 4 pour 100 de l’effectif ; la proportion des guérisons a été des plus favorables. Cependant, un décret du 19 avril 1880 a eu pour effet de donner à un officier de l’armée la direction des hôpitaux en temps de paix, et d’en confier le service subalterne à des religieuses. Les deux motifs allégués furent : l’un que la journée