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UN
HOMME D'ETAT RUSSE
D'APRES SA CORRESPONDANCE INEDITE

III.[1]
N. MILUTINE, LA RUSSIE ET LA POLOGNE EN 1862 ET 1863.

Nous avons laissé Nicolas Milutine en congé, occupé à refaire, sous un ciel plus clément, une santé ébranlée par les travaux et les tracas de l’émancipation des serfs, se consolant de sa disgrâce en contemplant de loin l’application de la grande réforme dont l’exécution était confiée à d’autres mains, séjournant tour à tour en Italie et en France, étudiant en curieux et en politique les hommes et les choses, et de Paris comme de Rome, au milieu des distractions de la société ou des séductions de l’art, suivant d’un œil inquiet les événemens qui se déroulaient aux bords de la Neva et de la Vistule. A une époque aussi troublée, alors que de tous côtés l’on se plaignait de la pénurie d’hommes, l’ancien adjoint du ministre de l’intérieur ne pouvait longtemps être abandonné aux douceurs du repos. A Saint-Pétersbourg, de hautes amitiés travaillaient à lui rouvrir les avenues du pouvoir, malgré les vieilles préventions d’une partie de la noblesse et l’hostilité persistante de la cour. Les incertitudes du gouvernement et la variété des influences en lutte au Palais d’hiver se manifestaient dans la diversité des offres d’emploi faites à Nicolas Alexèiévitch. Au milieu de son séjour à l’étranger,

  1. Voyez la Revue du 1er et du 15 octobre.