et de leur bourse pendant la lutte, croyaient avoir droit à une part dans les dépouilles des vaincus. M. Gladstone dut laisser en dehors de ses choix plusieurs de ses anciens collègues et non des moins considérés. M. Robert Lowe et M. Knatchbull-Hughessen reçurent, à titre de compensation, des sièges à la chambre haute, le premier avec le titre de vicomte Sherbrooke, le second sous le nom de lord Brabourne. M. Goschen fut envoyé en mission extraordinaire à Constantinople. Les exclusions portaient donc sur la nuance la plus modérée du parti libéral, sur les hommes que leurs convictions rapprochaient le plus du parti conservateur. C’est qu’il fallait faire aux radicaux, rendus exigeans par leurs succès, des concessions de places et des concessions d’opinions. On ne pouvait espérer qu’ils se tinssent pour satisfaits de la présence, dans le cabinet, de MM. Bright et Stansfeld, qui avaient fait partie de la précédente administration libérale et qui avaient presque cessé d’être considérés comme des radicaux. M. Chamberlain, député de Birmingham, qui s’était déclaré ouvertement républicain, qui avait organisé des comités et fondé des journaux pour la propagation de ses opinions, fut appelé au sein du cabinet comme président du bureau du commerce. M. Fawcett devint directeur-général des postes ; M. Dodson président des affaires provinciales, M. Mundella vice-président du conseil de l’instruction publique ; enfin sir Charles Dilke, dont les professions de foi républicaines et antireligieuses avaient fait un si grand scandale lors de ses débuts dans la vie politique, fut nommé sous-secrétaire d’état aux affaires étrangères, pour servir de contrepoids à lord Granville, qui rentrait au foreign office, et dont la présence dans le cabinet était impatiemment supportée par les radicaux.
Le résultat des élections générales avait frappé de stupeur les classes moyennes : elles n’avaient pas prévu la défaite des conservateurs ; elles s’étaient encore moins attendues au succès d’un aussi grand nombre de radicaux. La composition du nouveau cabinet et la part d’influence assurée à des hommes dont elles considéraient les opinions comme subversives, leur inspirèrent des inquiétudes évidemment excessives et déterminèrent un mouvement soudain de réaction. Plusieurs collèges électoraux se déjugèrent à quelques semaines, presque à quelques jours de distance, en remplaçant par des conservateurs des députés libéraux élevés à la pairie, comme M. Knatchbull-Hughessen, ou démissionnaires. La mort de lord Dalhousie, en faisant entrer son héritier, lord Ramsay, à la chambre des lords, fit vaquer un des trois sièges de Liverpool : ce siège fut enlevé, de haute lutte, par les conservateurs. Quelques jours plus tard, une cause semblable rendit libre un collège en Écosse, où les conservateurs avaient essuyé une défaite si