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membre à la suite sans doute des blessures reçues à la bataille. Plus de conduites secondaires, plus d’irrigations rayonnant sur les territoires traversés : la conduite forcée principale et au bout les 1,500 hectares de la forêt de Saint-Germain, voilà ce qui restait du plan primitif. Le « vaste régulateur » ne régularisait plus rien, mais il absorbait tout.

Un tel projet n’était pas fait pour désarmer les populations, toujours inquiètes depuis 1875. Leur résistance est en effet plus vive que jamais. Les unes, celles dont la conduite forcée traverse le territoire, craignent qu’un jour ou l’autre, en raison de l’insuffisante étendue du « vaste régulateur, » il ne leur faille prêter de gré ou de force leurs terres à un complément d’épuration plus ou moins coloré du nom d’irrigation. Les autres, celles qui sont riveraines de la belle forêt qu’il s’agit de dépecer, comme Saint-Germain, comme Conflans, comme Maisons-Laffitte surtout, — dont le parc, immense agglomération de coûteuses villas, se trouverait à 500 mètres du « vaste régulateur, » — voient avec une terreur légitime établir à leurs portes un véritable dépotoir ; le mot est juste, en dépit des protestations contraires. Comment qualifier autrement cette surface immense dont chaque hectare, chaque jour couvert de près de 200 mètres cubes d’eau, devra ainsi recevoir en une année de 60,000 à 70,000 mètres cubes d’immondices délayés ?

Nous n’hésitons pas à nous associer à cette résistance. Mais ce n’est pas seulement par sympathie pour des intérêts locaux, quelque prix que nous attachions à les voir respecter. C’est aussi parce qu’à nos yeux la solution que depuis cinq ans et plus on veut malgré tout faire prévaloir, est impuissante à satisfaire aux données du problème, et que, si elle assurait la désinfection de la Seine, — ce dont il est permis de douter, dans les conditions du moins où elle se présente, — ce ne serait qu’en sacrifiant ces intérêts agricoles dont au début on faisait sonner si haut et si justement l’importance au point de vue de la richesse publique.


II

Le problème à résoudre consiste en effet essentiellement à remplir ces deux conditions : assainir la Seine, utiliser les riches engrais contenus dans les eaux d’égout. La première, il est vrai, s’impose comme une nécessité absolue, tandis que l’abandon de la seconde ne constituerait qu’une perte pour la "prospérité agricole. Mais à quel point cette perte serait regrettable pour la richesse publique, c’est ce qu’ont toujours proclamé, c’est ce que