honneur qu’il était sincère dans son dévoûment pour Pitt aussi bien que dans son hostilité contre Addington. Ce fin lettré, ce scholar accompli, ne pouvait avoir la moindre sympathie pour le médiocre et lourd avocat qui occupait alors le poste de premier ministre du royaume-uni. Il le cribla d’épigrammes. Il le surnomma le docteur, en souvenir de la profession, fort honorable cependant, de son père. Il remua ciel et terre pour décider Pitt et ses amis à prendre la tête de l’opposition. Addington, de son côté, commettait fautes sur fautes. Le Times, son organe officieux, attaquait personnellement Pitt, qui jusque-là pourtant avait toujours donné son appui au cabinet.
La rupture allait éclater lorsque, des difficultés graves s’étant élevées entre la France et l’Angleterre, Addington, en présence de la menace d’une crise extérieure, fit un effort pour se rapprocher de Pitt. Un des vieux amis de ce dernier, Dundas, récemment promu à la pairie sous le nom de lord Melville, fut chargé de la négociation. Il échoua complètement. Addington avait imaginé une combinaison singulière : Pitt et lui auraient été secrétaires d’état, le poste de premier ministre étant attribué à un troisième personnage politique. Ce n’était pas sérieux. Pitt pouvait rester en dehors du ministère ; mais dès qu’il y rentrait, aucun autre que lui n’en pouvait être le chef. C’est ce que comprenaient les amis les plus intelligens d’Addington. Par leur entremise une nouvelle négociation fut ouverte sur les bases suivantes : Pitt, premier ministre, se concertant avec Addington sur la politique à suivre et lui faisant, pour lui et pour ses amis, une part importante dans la composition du cabinet. La négociation marcha bien jusqu’au jour où les deux principaux intéressés furent mis en présence. On vit alors que leurs prétentions étaient inconciliables : Addington ne se résignait pas à servir sous Pitt, et ce dernier ne voulait pas être sur le pied de l’égalité avec Addington. Les pourparlers furent rompus. Cette fois la scission était définitive.
La situation extérieure s’aggravait de jour en jour. Une nouvelle guerre entre la France et l’Angleterre était imminente. Le faible ministère Addington n’était pas en état de la conduire. Sa chute était inévitable. Il ne s’agissait plus de savoir qui lui succéderait. Fox, sans aspirer encore au pouvoir, profitait des divisions de l’ancienne majorité conservatrice pour relever l’influence du parti libéral. Il avait noué des relations avec les grenvillites. Dans les débats parlementaires, il cherchait les occasions de se montrer courtois envers Pitt. En mai 1803, au moment de la rupture de la paix d’Amiens, il y eut une belle discussion, dans la chambre des communes, sur la question de paix ou de guerre. Pitt prit la parole, rompant à cette occasion un silence de plus d’une année. L’effet de