retraite, plus conforme à des religieux, pour y pratiquer les exercices de la pénitence, dont ils dispensent si souvent les autres ?
« S’ils étaient chassés de leurs maisons, privés de leurs biens, poursuivis, emprisonnés, persécutés, ce que nous ne souhaitons pas, sachant que ces rigueurs sont éloignées de la douceur de l’église, ils pourraient dire alors qu’ils souffrent, mais non pas comme chrétiens, selon la parole de saint Pierre (II, IV, 16), et ils n’auraient droit de s’appeler ni bienheureux ni martyrs pour ce sujet, puisque le même apôtre ne déclare heureux ceux qui souffrent que lorsqu’ils souffrent pour la justice, si propter justitiam, beati, et que, selon un grand père de l’église et grand martyr lui-même, ce n’est pas la peine, mais la cause pour laquelle on l’endure qui fait les martyrs : non pœna, sed causa (saint Cyprien)[1]. »
Sous la pression de ce soulèvement ecclésiastique, l’Apologie des casuistes fut condamnée enfin à Rome en 1659. Mais les casuistes eux-mêmes ne l’étaient pas encore, ou du moins, s’il y avait eu autrefois des condamnations prononcées contre tel ou tel, c’était avant le grand bruit des Provinciales. Il fallait maintenant une sanction au cri public qui avait répondu à Pascal. Nicole d’ailleurs, en 1658, venait de traduire les Provinciales en latin ; il les avait fait lire ainsi à toute l’église, et c’était toute l’église que les jésuites avaient maintenant contre eux. Les papes durent donner satisfaction à cette plainte universelle. Alexandre VII, en 1665, condamna un certain nombre de propositions des casuistes et, avec elles, l’esprit même de la casuistique ; cette condamnation fut renouvelée et étendue en 1679 par Innocent XI ; mais ces actes pontificaux étaient de simples decreta rendus au nom du pape par ce qu’on appelait à Rome l’inquisition, et l’autorité de ces décisions n’était pas reconnue en France. Les adversaires de la morale relâchée auraient voulu « une bulle en forme[2]. » Elle ne fut jamais obtenue, mais, à défaut de Rome, l’église de France se prononça dans la fameuse assemblée du clergé de 1682.
Je prie qu’on remarque qu’à cette date de 1682, toute opposition était muette. Port-Royal avait pâli ; Pascal était mort depuis vingt ans, Arnauld était exilé ; les jésuites avaient près du roi le père de la Chaise, habile et aimable, et dans le monde leur Bourdaloue les couvrait du prestige de son talent et de son autorité morale. Mais tout en honorant le jésuite orateur, on ne pardonnait pas au jésuitisme. L’assemblée de 1682 prépara la