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DES
PROVINCIALES DE PASCAL

Les Lettres provinciales sont des pamphlets jansénistes, mais le jansénisme contient à la fois une théologie et une morale ; je vais le considérer successivement sous ces deux aspects.


I. — DE LA THEOLOGIE JANSENISTE.[1]

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Le fond de cette théologie n’est autre que la doctrine sur la grâce, développée dans l’Augustinus, livre posthume de l’évêque d’Ypres, Jansen ou Jansénius. On ne rencontre guère une matière théologique aussi difficile que celle de la grâce, où il s’agit d’accorder ce qu’on appelle le libre arbitre de l’homme avec la toute-puissance de la grâce de Dieu. Dieu et le libre arbitre ! que d’obscurités pourraient s’élever déjà, pour des métaphysiciens, par le seul conflit de deux idées dont chacune à part est si grosse d’obscurités ! Que sera-ce s’il n’est plus question de métaphysique, mais de théologie, et de textes à interpréter ? Je ne prétends nullement ici discuter ni résoudre le problème : je me bornerai à présenter un exposé historique, et ce sera beaucoup si les lecteurs ont le courage de me suivre. Pour sentir combien la difficulté est inextricable, il n’y a pas besoin de s’enfoncer dans les in-folio : il suffit de lire, mais de lire avec attention quelques lignes du Petit Catéchisme du diocèse de Paris, un opuscule d’une centaine de pages, écrites pour l’usage des enfans :

  1. Dans ce paragraphe premier, on retrouvera quelques pages qu’on a pu lire déjà dans mon Étude sur les Pensées de Pascal.