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environ. S’il n’est pas marié, il ne touche que 50 catties ou 31 kilogrammes 250. Il a droit, en outre, marié ou non, à une petite ration dégraisse de porc et d’huile à brûler en échange de 1,500 sapèques en cuivre ; la solde est doublée lorsqu’on est en campagne. Les Pavillons-Noirs reçoivent encore deux habits par an, au commencement de chaque saison. Dans les circonstances où il faut montrer de l’énergie, une distribution d’eau-de-vie de riz est ordonnée ; enfin, il leur est fait cadeau d’un peu de pâte d’opium du Yunnan lorsque les impôts prélevés arbitrairement sur les marchandises en transit ont été plus productifs que de coutume. — Ainsi, contrairement au traité que nous avons passé avec le roi Tu-Duc, ce dernier entretient sur le Fleuve-Rouge des bandes chinoises dans l’intention bien avérée de ne point y laisser pénétrer les Européens ! Ce fait seul constitue une violation des plus flagrantes de notre traité.

La ville de Lao-kaï, dont le nom signifie en chinois : « Vieux marché, » est appelée par les Annamites Bao-Thang ; ils lui donnent, aussi parfois le nom de Song-ngan, lequel est le nom d’une rivière, Nansi. Lao-kaï est située sur la frontière de l’empire chinois, au confluent de deux cours d’eau navigables. Par la rivière Nansi, l’on peut s’avancer assez loin dans le département de Kai-hoa, c’est-à-dire jusqu’au point de rencontre de routes diverses qui mènent au Yunnan, au Kouang-si, et dans la province annamite de Tuyen-Kouang. A n’en point douter, Lao-kaï est appelée à un grand développement commercial, mais il faut pour cela qu’un poste européen y remplace les Pavillons-Noirs, chose que nous considérons comme aisée. Aujourd’hui, ce n’est encore qu’une petite localité de trois cents maisons couvertes en paillettes. Elle est protégée par une forteresse carrée en maçonnerie, qui n’est elle-même qu’un mur en moellons de 0m,40 d’épaisseur, aux quatre coins duquel sont disposées des tours à plate-forme armées de petites pièces d’artillerie. « On m’a assuré, dit M. de Kergaradec dans la relation officielle de son voyage, que ces pièces dont on a eu soin d’ailleurs de faire l’exercice le jour où nous étions en vue de la forteresse, ne sont pour la plupart que des pierriers en bronze et qu’il y en avait quinze. Une seule pièce, achetée l’ année dernière à Hong-kong, paraît être d’un calibre respectable. Les armes européennes dont Luu-Ving-Phuoc dispose ne doivent pas être en grand nombre s’il est vrai, comme on me l’a dit, qu’il n’a consacré à la dépense de son armement qu’une somme de sept cents piastres (3,500 francs.) Sa force en fusils chinois est plus complète, et on s’accorde à dire que chaque drapeau noir possède au moins une de ces armes. »

Dans l’intérieur de la citadelle, il y a un assez grand nombre