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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




31 août 1880.

Après la session des chambres, les élections et la session des conseils-généraux, après le voyage des grands pouvoirs à Cherbourg, les voyages ministériels à Montauban, à Toulouse ou à Nîmes, après les ovations et les discours, encore des discours, des ovations et des fanfares. Le malheur est que les spectacles officiels et les discours, en se succédant, ne varient guère. Ils ne font tout au plus, en se répétant, que mieux accentuer les caractères d’une situation où les mots, les apparences, les illusions et les banalités ne laissent pas de jouer un certain rôle. Assurément, on n’a pas besoin de le répéter sans cesse, la république existe ; elle a, si l’on veut, atteint l’âge de sa majorité. Elle n’est pas seulement dans la constitution, dans les protocoles et au frontispice des actes officiels ou des monumens publics ; elle est entrée dans la réalité plus qu’elle n’y était jamais entrée, elle est généralement acceptée. Elle est arrivée à ce point où, par le cours naturel des choses, elle profite presque nécessairement des votes qui se succèdent, des manifestations légales du pays. Elle a eu l’avantage au dernier scrutin départemental, elle l’aurait probablement encore, peut-être dans des proportions plus grandes, à un scrutin nouveau. Qu’on se plaise à constater que la république a des succès de suffrage universel, qu’elle est un régime établi, qu’on le constate simplement sans trop le répéter à tout propos, cela se comprend encore ; mais ce qui finit par être étonnant et même un peu inquiétant, disons le mot, c’est cette espèce d’hébétement de satisfaction qui perce dans tous les discours, dans les témoignages qu’on se distribue avec une infatigable libéralité ; c’est cette infatuation croissante qui affadit tout, qui fait qu’à l’heure où nous sommes tous ceux