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Étudiés de si près par une curiosité bien préparée et pourvue de tous les instrumens nécessaires, les monumens s’étaient laissé dérober des secrets que l’on était loin de soupçonner lorsqu’on avait jeté pour la première fois les yeux sur les restes de l’antiquité. C’est ainsi que l’Anglais Penrose surprenait et dénonçait l’artifice par lequel les architectes des Propylées et du Parthénon avaient donné une courbure légère à des lignes que l’œil prend pour des droites ; il montrait en quoi cette correction subtile et inaperçue ajoutait à la beauté de l’édifice et en augmentait l’effet[1]. Hittorf était de même conduit, par une minutieuse étude des ruines de la Sicile, à des résultats plus importans encore. Le premier, il signalait le rôle que la peinture avait joué dans la décoration des édifices grecs ; il affirmait que, dans bien des parties de l’édifice, la pierre ou le marbre avaient été recouverts d’un enduit coloré qui, par la différence des tons, distinguait l’un de l’autre les différens membres de l’architecture et qui donnait plus d’accent aux moulures, plus de valeur et de relief aux figures qui se détachaient sur ces fonds teintés[2]. Ces idées dérangeaient trop d’habitudes pour ne pas soulever de vives protestations ; d’ailleurs leurs partisans semblèrent parfois travailler à en compromettre eux-mêmes le succès par certaines assertions trop absolues et par certaines applications malheureuses de ce système d’ornementation ; cependant le principe même de la polychromie a été confirmé par trop de faits pour n’avoir pas fini par triompher de toutes les objections et de toutes les résistances.

Des trois branches principales de l’art antique, celle qui, pour les modernes, était le moins représentée par les monumens, celle dont l’histoire ne s’écrivit guère, pendant longtemps, que d’une manière toute conjecturale et à l’aide des témoignages anciens, c’était la peinture proprement dite, l’art des Polygnote, des Zeuxis et des Apelle. On avait bien les fresques des cités campaniennes

  1. F. -C. Penrose, an Investigation of the principles of Athenian Architecture ; Londres, 1851, in-f°, avec planches.
  2. J.-J. Hittorf, Restitution du temple d’Empédocle à Sélinonte, ou l’Architecture polychrome chez les Grecs. Paris, 1851, in-4o, et atlas in-f°.