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Irlande à quiconque payait un fermage annuel de 40 shillings, devait être réservée à ceux de 10 livres et au-dessus ; une dotation suffisante était destinée au clergé catholique afin de le rendre indépendant des agitateurs. Dans l’ensemble, ces mesures étaient conformes aux tendances modérées de la chambre ; elles passèrent à une majorité considérable. Les whigs pensaient déjà que les lords n’oseraient pas résister davantage ; Robert Peel, toujours contraire aux concessions, se disposait à quitter le ministère devant cette manifestation de l’opinion publique. Mais une semaine s’était à peine écoulée que la chambre haute se trouvait saisie à son tour par une pétition du doyen et du chapitre de Windsor. Le duc d’York qui la présentait, l’accompagna d’un discours : « Je suis d’autant plus affecté dans la circonstance, dit-il, que la cruelle maladie qui a assombri l’existence de mon père bien-aimé est due à une agitation de même nature. Mon sentiment sur ce sujet est fondé sur les principes que l’on m’a inculqués dans ma jeunesse, que j’ai conservés dans l’âge mûr après y avoir sérieusement réfléchi, et que je maintiendrai jusqu’à mon dernier jour, en quelque situation que je me trouve. » C’était presque un discours du trône, puisque le roi était vieux et malade et que le duc d’York était l’héritier présomptif. Cette fois encore, il remporta la victoire ; les protestans obstinés applaudirent ; les autres s’affligèrent, car la volonté royale ne s’était jamais affichée avec tant d’éclat depuis Jacques II. Cette déclaration avait le tort de surexciter toutes les opinions ; O’Connell injuriait le prince dans ses discours aux paysans d’Irlande, tandis que les tories exaltés placardaient ses paroles en lettres d’or sur les murs de leurs habitations. Wellington, plus sage que ses amis, conseillait de dissoudre le parlement afin que de nouvelles élections fussent faites pendant que le parti catholique était encore dans le désarroi. Les ministres, divisés sur la question du jour, n’osèrent rien décider.

Tandis que les affaires de politique intérieure se débattaient, tant dans la chambre qu’au dehors, avec une ardeur croissante, Canning donnait à la politique étrangère une allure plus libérale en s’appuyant avec adresse sur la répugnance qu’inspiraient au peuple anglais les tendances absolutistes des monarques du continent. Les doctrines de la sainte-alliance n’avaient jamais été populaires en Angleterre ; en outre, le régime commercial auquel l’Espagne avait soumis ses colonies ne plaisait guère aux négocians de Londres et de Liverpool ; aussi, lorsque ces colonies se déclarèrent indépendantes, en 1816, eurent-elles toutes les sympathies de la nation britannique. Par suite de la réduction des dépenses militaires, quantité d’officiers se trouvaient sans emploi ; ils offrirent leurs services aux jeunes républiques d’Amérique. Il n’y