Page:Revue des Deux Mondes - 1880 - tome 39.djvu/574

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
568
REVUE DES DEUX MONDES.

adhérer à ses doctrines. Depuis que l’association universelle a cessé de fonctionner, le parti socialiste belge a tâché de se reconstituer sur une base nationale. Deux tendances existent : les uns veulent, comme les socialistes allemands, s’emparer du pouvoir par l’élection et ils réclament le suffrage universel, de commun accord avec les radicaux de la bourgeoisie ; les autres, représentés par le journal le Mirabeau, prétendent, comme les nihilistes, qu’il faut d’abord tout détruire. « Quiconque, disent-ils, n’a pas porté les haillons de la misère ne peut vouloir la vraie révolution. L’ouvrier seul la fera. On emploie contre lui toutes les armes ; soit : œil pour œil, dent pour dent. Mettons en œuvre le feu, le fer, le poison et le pétrole. Faisons table rase. Abattons cette société pourrie dont notre misère et notre ignorance sont la base. Vainqueurs, nous élèverons une société nouvelle fondée sur le travail et la justice. »

Les poursuites contre ces appels à la force n’ayant abouti qu’à leur donner un retentissement qu’elles n’avaient pas, on y a renoncé. Dans ces dernières années le socialisme ne semble pas avoir gagné de terrain. Cependant la Belgique présente des conditions exceptionnellement favorables à son développement. Le nombre des ouvriers est très considérable, et la population étant la plus dense de l’Europe, le salaire est moins élevé que dans les autres pays occidentaux.

L’Internationale pénétra en Hollande seulement vers 1869. Une section se constitua à Amsterdam, avec un journal de Standaart des Volks. Elle ne tarda pas à rayonner et à en fonder d’autres dans les principales villes, à Arnhem, à Utrecht, à Harlem, à Leeuwaarden et à Rotterdam. Puis des émissaires visitèrent les petites villes et y réunirent des adhésions individuelles. Deux nouveaux journaux parurent : le Werkman et le Volksblad. On établit une association générale destinée à grouper toutes les sociétés ouvrières du pays Het Nederlandsch Werklieden-Verbond. Mais l’esprit local et individualiste, très prononcé en Hollande, fit naître de nombreuses résistances. Après le premier moment d’expansion et d’enthousiasme, l’Internationale, même avant de disparaître, perdit une partie de ses conquêtes. Toutefois, le mouvement socialiste est encore représenté par quelques groupes et par les journaux Oost en West et Recht voor allen. Ici aussi la liberté absolue a prévenu toute explosion.


III.

Le socialisme s’était infiltré d’Allemagne en Autriche dès 1866. L’Internationale s’y greffa vers 1868, principalement par l’apostolat