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LA
RÉGION DU BAS RHONE

II.[1]
LE PORT D’AIGUES-MORTES ET LES HOUILLES DU GARD.


I

Le nom seul d’Aigues-Mortes en dit plus que bien des descriptions et réveille tout naturellement à l’esprit l’idée de marécages. Aucune ville en effet n’est mieux nommée. Aigues-Mortes se trouve dans la zone d’inondation du Rhône et est encore entourée de tous côtés par les étangs, les dunes et les bas-fonds qui constituent l’appareil littoral. Tout ce territoire aujourd’hui plus ou moins émergé, qui forme autour de l’ancienne ville de saint Louis une immense lande à peu près déserte, a fait autrefois partie de la mer; et le grand diluvium du Rhône et de la Durance a comblé, dès l’origine de notre période géologique actuelle, le golfe primitif qui s’enfonçait jusqu’aux environs de Beaucaire et de Tarascon et dont les deux extrémités étaient la montagne de Fos en Provence et celle de Cette en Languedoc.

Par sa nature même, ce littoral de formation toute récente ne pouvait être que très instable. Les différens bras du Rhône et de la Durance ont divagué longtemps sur l’immense plaine de cailloux déposés par le déluge alpin ; les grandes eaux d’inondation se sont étendues sur cette nappe presque horizontale de matériaux roulés, y ont laissé des couches successives de sable et de limon ; et

  1. Voir la Revue du 15 février.