Page:Revue des Deux Mondes - 1880 - tome 39.djvu/376

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
LES
PAPIERS DU DUC DE SAINT-SIMON
AUX ARCHIVES DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES

UNE ŒUVRE INÉDITE DE L’AUTEUR DES MÉMOIRES.

Le général marquis de Saint-Simon, mort en 1865, racontait qu’un dimanche de l’année 1819 il s’était présenté, à l’issue de la chapelle, à l’audience du roi pour lui demander une faveur. Louis XVIII, qui avait du goût pour lui, lui adressa quelque paroles encourageantes : « Sire, reprit le marquis, il s’agit de la liberté d’un prisonnier à la Bastille. — Vous voulez rire, je pense, monsieur de Saint-Simon. — Sur la Bastille, oui, Sire, mais non sur des manuscrits originaux du duc de Saint-Simon, enlevés en 1760 et prisonniers d’état de votre majesté au ministère des affaires étrangères. » — Le 6 mai 1819, sur un ordre du roi, une partie des manuscrits étaient remis à l’héritier du duc, et, grâce à cette générosité de Louis XVIII, les Mémoires de Saint-Simon ont été connus de notre siècle, qui a pu en jouir dans tout l’épanouissement de sa gloire littéraire. M. Villemain les avait devinés à travers des fragmens, et il eut le temps de les signaler dès leur apparition; MM. Sainte-Beuve et de Montalembert purent en parler, et ce chef-d’œuvre entra dans notre littérature avec ce cortège d’admiration qui ne l’abandonnera pas.

Mais il restait au dépôt des affaires étrangères d’autres prisonniers d’état de la même origine. Longtemps on avait paru oublier leur existence, puis, quand des chercheurs avaient voulu pénétrer jusqu’à eux, ils avaient échoué dans leurs tentatives. Quels avaient