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LES
ÉLECTIONS ANGLAISES


I.

« Samson, les Philistins avancent ! tel est le cri qui se fait entendre de toutes parts. Que Samson se montre donc et qu’il fasse encore une fois sentir la force de son bras. » Ainsi s’exprimait à Huddersfield, dans les premiers jours de janvier 1874, un député ministériel, M. Leatham, traduisant par un de ces emprunts que les Anglais aiment à faire au langage biblique la confiance des amis de M. Gladstone dans l’éloquence et la popularité de leur chef. Aucun avertissement, aucun revers électoral, n’avaient affaibli cette confiance présomptueuse. Trois semaines plus tard, la dissolution du parlement était prononcée, et c’était en vain que le Samson du parti libéral multipliait ses efforts; c’était en vain qu’il faisait luire aux yeux des contribuables la perspective de la suppression de l’income-tax, il échappait péniblement à un échec personnel, et une défaite accablante venait dissiper les illusions de son parti. Libéraux et radicaux réunis atteignaient à peine à 250 voix, et même en ajoutant à leur nombre tous les home rulers, ou autonomistes irlandais, le parti conservateur avait encore une majorité de 60 voix sur l’ensemble de la chambre des communes.

Les élections générales de 1880 ont été la contre-partie complète des élections de 1874. Cette fois, c’est le chef du parti conservateur qui a fait appel au corps électoral avec une confiance destinée à la déception la plus cruelle. Les conservateurs ont été décimés, ils ne reviennent à la chambre qu’au nombre de 240, tandis que leurs adversaires réunissent 350 voix et disposeront ainsi d’une majorité assurée, indépendamment des votes des autonomistes