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percé à la partie supérieure. Qu’on fasse varier les dimensions ou la forme de la matrice et de l’ouverture, qu’on emploie l’argile tantôt pure, tantôt mélangée de grains de quartz, de paillettes de mica, de petites lames ou de tiges minces, toujours une schistosité véritable se manifeste. La pâte devient fibreuse et feuilletée, et tous les élémens mobiles s’orientent dans le sens du glissement. Du cristal, ramolli par la chaleur et soumis à un écoulement analogue, accuse, après le refroidissement, des stries que la réfraction fait discerner et qui témoignent d’une structure semblable. Plus d’une opération industrielle réalise aussi les conditions de l’expérience : l’étirement de l’argile peut rendre feuilletées les briques ou les tuiles, et, après le laminage, le fer et le plomb sont parfois schisteux. Quant aux fossiles, on en imite aisément les déformations en les enchâssant dans une masse de glaise ou de plomb dont la résistance est proportionnée à celle de leur têt. Des cônes allongés de craie, noyés dans une pâte molle qu’on étire ou qu’on écrase, s’alignent dans le sens du mouvement, s’amincissent et se brisent en fragmens qui s’écartent : telles sont les bélemnites tronçonnées si nombreuses dans les Alpes. On voit clairement par ces expériences que le feuilleté des roches comme la foliation des minéraux se produisent, quel que soit le sens de la pression, dans la direction où le glissement rencontre la moindre résistance. Comment s’étonner dès lors que la schistosité reste indépendante de la stratification, qu’elle affecte autant les roches cristallines que les couches sédimentaires, et qu’elle soit si répandue au milieu des tassemens qu’ont subis les pièces disjointes de l’écorce terrestre ? D’ailleurs, puisque des corps solides sous une pression suffisante se comportent comme des liquides visqueux, on ne saurait désormais arguer de la schistosité d’une roche en faveur de son origine sédimentaire. Le gneiss, notamment, se trouve par là définitivement rattaché au granité, auquel le relient tant de passages insensibles et dont il n’est guère qu’une modification mécanique.

Comme le métamorphisme, la schistosité est surtout fréquente dans les terrains anciens et les régions disloquées. Si les schistes et les gneiss se présentent souvent en feuillets verticaux, il faut y voir, non pas la preuve d’une stratification relevée, mais le résultat des écrasemens et des refoulemens latéraux qui ne laissaient à leur écoulement qu’une issue verticale. Telle est aussi, sur de plus vastes proportions, la structure des grands massifs comme le Mont-Blanc, le Pelvoux, la Maladelte. Les granités feuilletés qui en occupent le centre, foraient d’immenses couches redressées en murailles abruptes, dirigées suivant l’axe de la chaîne et renversées du centre vers les bords. Elles surplombent même